Un jour… Un chef-d’œuvre (129)

Car dans cette rose étaient contenus le ciel et la terre…

 

Martin Schongauer (1450-1491), La Vierge au Buisson de roses, 1473 (Église des Dominicains de Colmar), détail.

Benjamin Britten (1913-1976 ), A Ceremony of Carols op. 28, 3. There is no rose, interprété par le Choir of King’s College, Cambridge, dirigé par Sir David Willcocks.

Un Carol est chant festif, généralement religieux mais pas nécessairement liée au culte de l’église, et souvent avec une danse ou un personnage populaire. Le verbe caroling (ou « to carol ») se réfère également au chant des chants de Noël.

Aujourd’hui, le Carol est quasi synonyme de chant de Noël, le chant de l’ Avent , et dans une bien moindre mesure [la citation nécessaire ] par le chant de Pâques ; cependant, malgré leur association actuelle avec la religion, cela n’a pas toujours été le cas.

Le mot carol est dérivé du vieux mot français carole, une danse en cercle accompagnée de chanteurs. Les chants de Noël étaient très populaires en tant que chants de danse des années 1150 aux années 1350, après quoi leur utilisation s’est développée en tant que chants de procession. D’autres ont été écrits pour accompagner des pièces de théâtre à mystère religieux.

La musique sacrée était traditionnellement chantée en latin par le clergé ou les chants nommés de l’église catholique. À la suite de la Réforme anglicane, les réformateurs avaient pour objectif de ramener la musique « au peuple ». Pour permettre à la personne ordinaire de chanter de la musique d’église, de grands efforts ont été faits pour traduire les textes musicaux du latin dans les langues maternelles que les gens parlaient. Quelques mots latins y restaient cependant présents par habitude.

A Ceremony of Carols, opus 28, de Benjamin Britten, est une œuvre pour chœur à trois voix égales (dans la version d’origine un chœur d’enfants) avec des interventions de voix d’enfants ou de femmes en solistes. L’ensemble comporte une partie de harpe (pour l’accompagnement et l’instrument assure seul le numéro 7 Interlude). Britten commença à écrire la partition au cours d’une traversée en bateau en 1942.

Écrite pour le temps de Noël, l’œuvre est constituée de 11 parties (11 Christmas Carols). La partition, à l’écriture souvent très élaborée, a été conçue à partir de ces 11 textes essentiellement tirés de The English Galaxy of Shorter Poems édité par Gerald Bullett. Ils utilisent l’anglais, le moyen anglais et le latin.

[…] Le thème de La Vierge au buisson de roses repose sur toute une symbolique chrétienne qui était familière aux hommes les plus cultivés du 15e siècle (donc très peu d’entre eux) mais qui nous échappe totalement aujourd’hui. Les symboles utilisés ne relèvent absolument pas de l’approche rationnelle du monde qui domine au 21e siècle. Tout tourne autour d’évocations floues, associées à des « mystères » comme l’immaculée conception, mais porteuses de sens pour les croyants de l’époque, et peut-être encore pour ceux d’aujourd’hui.

La Vierge est placée dans un jardin fleuri, ce qui était courant dans la peinture de la région du Haut-Rhin à cette époque. Le thème du jardin clos et secret s’inspire d’un passage du Cantique des cantiques, l’un des livres de l’Ancien Testament : « « Hortus conclusus soror mea, sponsa ; hortus conclusus, fons signatus » (Le jardin clos est ma sœur, ma fiancée ; le jardin clos est une source scellée). L’hortus conclusus (jardin clos) a été associé à la représentation de la Vierge dans l’iconographie occidentale à partir du 15e siècle car il évoque symboliquement la virginité (la source scellée) et constitue un thème particulièrement propice à l’illustration picturale.

Schongauer place sa Vierge à l’Enfant sur un banc de jardin adossé à un treillage supportant un rosier grimpant. La rose est un symbole fréquemment utilisé dans les écrits chrétiens pour évoquer la Vierge. Toute une littérature s’est développée au cours de l’histoire sur ce thème, avec l’ambition d’illustrer le dogme de l’Immaculée Conception. Celui-ci postule que la Vierge n’est pas affectée par le péché originel qui pèse sur l’humanité du fait de la désobéissance d’Adam et Ève, qualifiée de Chute. Ainsi saint Ambroise écrit :

« Avant que l’Homme ne chute, la Rose était née, sans l’Épine »

Et saint Bonaventure s’adresse ainsi à la Vierge :

« Rose pure, rose d’innocence, rose nouvelle et sans épine, rose épanouie et féconde, rose devenue pour nous un bienfait de Dieu, vous avez été établie Reine des cieux ; il n’est personne qui puisse jamais vous être comparé ; vous êtes le salut du coupable, vous êtes le soutien de toutes nos entreprises. »

Cette rose mystique (rosa mystica, du grec mystos, mystère) permet aux peintres d’associer la figure de la Vierge de l’humilité et une végétation particulièrement intéressante sur le plan pictural. Les fonds décoratifs comportant beaucoup de dorures peuvent être remplacés par un buisson fleuri. La composition s’éloigne donc des conventions remontant à l’art byzantin et gagne en intimité avec l’observateur. La Vierge apparaît dans un cadre connu et se rapproche des humains. […]
Outre l’arrière-plan, l’inscription figurant sur le nimbe doré entourant la tête de la Vierge renvoie également à la rosa mystica : « Me carpes genito tu que sanctissima virgo » (Tu me cueilleras pour ton fils, toi aussi, très Sainte Vierge). […]

Patrick Aulnas, Martin Schongauer. La Vierge au buisson de roses (1473), Lire l’article complet

Martin Schongauer (1450-1491), La Vierge au Buisson de roses, 1473 (Église des Dominicains de Colmar).