Un jour… Un chef d’œuvre (191)

Sans style, il n’y a pas de musique.

Astor Piazzolla

Eugenio Cuttica (peintre argentin né en 1957), Luna y el árbol de la vida rojo (Lune et arbre de vie rouge), 2015.

 

Astor Piazzolla (1921-1992), Les Quatre Saisons, Primavera Porteña (Printemps à Buenos Aires), interprété par Astor Piazzolla au bandonéon et son Quintette (Violon, piano, guitare, contrebasse et bandonéon)

Las Cuatro Estaciones Porteñas (Les Quatre Saisons de Buenos Aires) également connues sous le nom Estaciones Porteñas, sont un ensemble de quatre compositions de tango écrites par le compositeur argentin Astor Piazzolla entre 1965 et 1970.

Bandonéon (aérophone)

Le bandonéon fait partie de la grande famille des accordéons. Toutefois, contrairement aux accordéons chromatiques et diatoniques un peu mieux connus, il ne dispose pas de boutons ou de touches d’accords pour la main gauche. Les boutons du bandonéon, comme ceux du concertina, commandent uniquement des notes individuelles. Seules des combinaisons de touches permettent à l’instrumentiste de jouer des accords. Le bandonéon se distingue encore par un soufflet beaucoup plus long, et par des flancs presque carrés, aux angles souvent biseautés.

Le bandonéon doit son nom à Heinrich Band (1821-1860). Marchand d’instruments et professeur de musique à Krefeld, ville allemande de Rhénanie du Nord-Westphalie, Band apporte dès les années 1840 plusieurs améliorations au Konzertina allemand, dont il augmente sensiblement l’étendue. Il donne à son invention le nom de Bandonion. L’instrument devient rapidement l’un des plus populaires à travers toute l’Allemagne, avant de céder du terrain, au cours du siècle passé, face à l’accordéon, plus facile à jouer.

Entre-temps, les marins et les émigrants européens emportent le bandonéon avec eux vers l’Amérique du Sud. L’instrument se découvre alors une nouvelle patrie dans les bistrots des ports de Buenos Aires (Argentine) et de Montevideo (Uruguay), précisément là où naît le tango, à l’aube du XXe siècle. Le bandonéon s’impose d’ailleurs très vite comme l’instrument emblématique de l’orchestre de tango, l’orquesta típica.

Cet exemplaire de marque AA est issu de la manufacture d’Alfred Arnold, située à Carlsfeld, un village des Monts-Métallifères de Saxe, à quelques kilomètres de la frontière tchèque. Alfred Arnold (1877-1933) y fonde sa fabrique en 1911, en association avec son frère. Leur père Ernst Louis possédait déjà, depuis 1864, une manufacture d’accordéons qui, après sa mort en 1910, allait être dirigée par un autre de leurs frères, Ernst Hermann. Près de 30 000 bandonéons sortiront des ateliers d’Alfred Arnold à destination de l’Argentine et de l’Uruguay. La production s’arrête en 1948, lorsque l’entreprise est expropriée par les autorités est-allemandes.

D’après son numéro de série, ce bandonéon a plus que probablement été construit en 1929. Du côté gauche, il est muni de 33 boutons – 31 bisonores et 2 unisonores – et, sur son flanc droit, de 28 boutons bisonores et 10 unisonores. « Bisonore » signifie que l’on peut produire deux notes différentes selon que l’on pousse ou que l’on tire le soufflet, tandis que les boutons « unisonores » n’émettent qu’une seule et même note, quel que soit le mouvement du soufflet. Cet exemplaire est un modèle haut-de-gamme Premier, muni des meilleures lames de toute la production AA. Issu de l’héritage du virtuose Alfredo Marcucci (Buenos Aires, 1929 – Hasselt, 12 juin 2010), ce bandonéon était son instrument favori vers la fin de sa vie.

Musée des Instruments de Musique de Bruxelles.