Un jour… Un chef-d’œuvre (134)

A-t-on jamais vu un piano de cette espèce ?

 

Grand Piano Érard (vers 1840), décoré à Londres. Plus d’informations sur cet instrument unique en son genre…

Ce piano, extraordinairement marqueté, fut dessiné par George Henry Blake, est l’un des instruments les plus richement décorés du XIXe siècle. Il a été commandé à la succursale londonienne de la prestigieuse firme française Érard par Thomas Henry Foley (1808-1869), baron de Kidderminster et politicien anglais, pour Witley Court, sa résidence près du Herefordshire et du Worcestershire.

 

Sigismond Thalberg (1812-1871), L’art du chant appliqué au piano, Op. 70 No. 20, Auf Flügeln des Gesanges, sur les ailes du Chant d’après Mendelssohn, interprété par Paul Wee.

« Thalberg est le plus grand pianiste du monde.
Et Liszt?
Liszt? Ah – C’est le seul. »

Propos attribué à la princesse de Belgiojoso… ou à Marie d’Agoult.

TROISIÈME ÉPISODE

Vers les trois heures moins un quart, nous étions arrivés au n°26 ; on avait commencé à dix heures ; c’était le tour de mademoiselle Hermance Lévy, qui déteste les pianos durs. Rien ne pouvait lui être plus favorable, chacun se plaignant à cette heure qu’on ne pût toucher le clavier sans le faire parler; aussi elle nous a enlevé le concerto si légèrement qu’ elle a obtenu net le premier prix. Quand je dis net, ce n’est pas tout à fait vrai ; elle l’a partagé avec mademoiselle Vidal et mademoiselle Roux. Ces deux demoiselles ont aussi profité de l’avantage que leur offrait la douceur du clavier, douceur telle, qu’il commençait à se mouvoir rien qu’en soufflant dessus. A-t-on jamais vu un piano de cette espèce ? Au moment d’entendre le n°29, j’ai encore été obligé de sortir pour chercher un médecin ; un autre de nos messieurs du jury devenait très rouge, et il fallait le saigner absolument. Ah ! ça ne badine pas, le concours de piano ! et, quand le médecin est arrivé, il n’était que temps. Comme je rentrais au foyer du théâtre, je vois revenir de la scène le n°29, le petit Planté, tout pâle ; il tremblait de la tête aux pieds, en disant : « Je ne sais pas ce qu’a le piano, mais les touches remuent toutes seules. On dirait qu’il y a quelqu’un dedans qui pousse les marteaux. J’ai peur. – Allons donc, gamin, tu as la berlue, répond le petit Cohen, de trois ans plus âgé que lui. Laissez-moi passer ; je n’ai pas peur, moi. (… la suite dès demain!)

Hector Berlioz, Les Soirées de l’orchestre, 1852.

Sigismond Thalberg (1812-1871), L’art du chant appliqué au piano, Op. 70 No. 20, Voi che sapete (d’après les Noces de Figaro de W.A. Mozart), interprété par Paul Wee.