Un jour… Un chef-d’oeuvre! (53)

« Il les emmena jusque vers Béthanie et, levant les mains, il les bénit. Et il advint, comme il les bénissait, qu’il se sépara d’eux et fut emporté au ciel. Pour eux, s’étant prosternés devant lui, ils retournèrent à Jérusalem en grande joie, et ils étaient constamment dans le Temple à louer Dieu »

(Évangile de Luc 24, 50-53).

53ab. Giotto di Bondone, L'Ascension du Christ, entre 1304 et 1306.

Giotto di Bondone (1266-1337), L’Ascension du Christ, entre 1304 et 1306 (détail).

« C’est à eux qu’il s’était montré après sa Passion. Il leur en avait donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur était apparu, et leur avait parlé du royaume de Dieu… » (Ac 1,3).
« Il ne vous appartient pas de connaitre les délais et les dates… Vous allez recevoir une force, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac 1,7-8).
« Après ces paroles, ils le virent s’élever et disparaitre à leurs yeux dans une nuée… Deux hommes, en vêtements blancs, se tenaient devant eux et disaient : “Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? ”… » (Ac 1,9…11).
« Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel » (Ac 1,11).

Extraits des Actes des Apôtres

Johann Sebastian Bach (1685-1750), Oratorio de l’Ascension, Choeur d’ouverture, Lobet Gott in seinen Reichen, interprété par le Collegium Vocale de Gand, dirigé par Philippe Herreweghe.

Lobet Gott in seinen Reichen,
Louez Dieu dans ses royaumes,
Preiset ihn in seinen Ehren,
Prônez-le dans sa gloire,
Rühmet ihn in seiner Pracht;
Glorifiez-le dans sa splendeur ;
Sucht sein Lob recht zu vergleichen,
Cherchez à trouver des louanges à sa mesure
Wenn ihr mit gesamten Chören
En lui adressant par les voix de tous vos chœurs
Ihm ein Lied zu Ehren macht!
Un cantique d’honneur.

« on ne sait rien de la genèse de cette oeuvre, dont même la date de l’Ascension 1735, quoique vraisemblable, n’est qu’hypothétique. À cette époque, Bach ne compose plus de cantates, mais adapte des morceaux d’œuvres antérieures en de nouveaux ensembles, ce qu’il a fait peu auparavant pour son oratorio de Noël. Il s’agit bien ici, à nouveau, d’un oratorio, le dernier de ceux aujourd’hui connus de Bach, et dans la mesure où la narration est empruntée aux textes mêmes des Écritures. Mais ni sa structure, ni sa durée, contrairement aux oratorios de la Passion, ne diffèrent de celle d’une cantate, ce qui explique que cet Oratorio de l’Ascension ait été catalogué parmi les cantates […].

Un chœur de louange ouvre l’oeuvre, sans rapport textuel avec l’Ascension. Le récit des événements peut alors commencer, selon un bâti narratif emprunté aux évangiles de Luc et de Marc ainsi qu’aux Actes des Apôtres. Ce récit est d’abord interrompu par l’expression de la tristesse des apôtres, c’est à dire de tous les chrétiens, à voir le Christ se séparer d’eux et disparaître, les laissant dans la souffrance. Mais l’apparition de deux anges vient les rassurer en leur rappelant l’annonce de son retour. C’est dans cet espoir qu’ils veulent vivre désormais sous peine de sombrer dans le désespoir.

53a. Giotto di Bondone, L'Ascension du Christ, entre 1304 et 1306.

Giotto di Bondone (1266-1337), L’Ascension du Christ, entre 1304 et 1306.

Johann Sebastian Bach (1685-1750), Oratorio de l’Ascension, Air d’alto Ach, bleibe doch, mein liebstes Leben, interprété par Catherine Patriasz et le Collegium Vocale de Gand, dirigé par Philippe Herreweghe.

Ach, bleibe doch, mein liebstes Leben,
Ah, demeure donc, ma vie chérie,
Ach, fliehe nicht so bald von mir!
Ah, ne t’enfuis pas si tôt de moi !
Dein Abschied und dein frühes Scheiden
Ton adieu et ton départ prématuré
Bringt mir das allergrößte Leiden
Me causent la plus grande des douleurs,
Ach ja, so bleibe doch noch hier;
Ah, demeure donc encore ici,
Sonst werd ich ganz von Schmerz umgeben.
Sinon je serai tout entier entoure de douleur.

Johann Sebastian Bach (1685-1750), Messe en si mineur BWV 232, Agnus Dei interprété par Andreas Scholl et le Collegium Vocale de Gent, dirigé par Philippe Herreweghe.

Agnus Dei qui tollis peccata mundi, miserere nobis.
Agneau de Dieu, qui porte les péchés du monde, aie pitié de nous.

Comme il l’avait fait pour l’Oratorio de Noël, quelques mois avant celui de l’Ascension, l’oeuvre nouvelle est faite de parodies d’œuvres antérieures, à l’exception des récitatifs, bien entendu, et du choral final de la première partie, c’est à dire le pages les plus simples quant à l’écriture. Mais les sources originales ayant disparu, tout paraît original à l’auditeur d’aujourd’hui, si ce n’est que l’air d’où est tiré l’aria d’alto de l’oratorio servira plus tard à constituer l’Agnus Dei de la Messe en si mineur. »

Gilles Cantagrel, Les Cantates de J.-S. Bach, Paris, Fayard, 2010, pp. 571-572.