« Cet asile
aimable et tranquille
Par le bonheur est habité,
C’est le riant séjour de la félicité.
Nul objet ici n’enflamme
L’âme,
Une douce ivresse
Laisse
Un calme heureux dans tous les sens;
Et la sombre tristesse
Cesse
Dans ces lieux innocents. »
Pierre-Louis Moline (1739-1820), Livret pour l’Orphée et Eurydice de C.W. Gluck, Acte 2 Air d’Eurydice.
Jean-Baptiste-Camille Corot (1796-1875) – Orphée ramenant Eurydice des Enfers, 1861.
Christoph Wilibald Gluck (1714-1787), Orphée et Eurydice, Acte 2, Ballet des ombres heureuses, interprété par des musiciens du Royal Opera House de Covent Garden.
Hector Berlioz qui appréciait pourtant assez peu la flûte mentionne en ces termes la Scène des Champs Élysées dans son Traité d’instrumentation et d’orchestration :
« S’il s’agit par exemple, de donner à un chant triste un accent désolé, mais humble et résigné en même temps, les sons faibles du medium de la flûte, dans les tons d’ut mineur et de ré mineur surtout, produiront certainement la nuance nécessaire. Un seul maître me paraît avoir su tirer grand parti de ce pâle coloris : c’est Christoph Willibald Gluck. En écoutant l’air pantomime en ré mineur qu’il a placé dans la Scène des Champs-Élysées d’Orphée, on voit tout de suite qu’une flûte devait seule en faire entendre le chant. Un hautbois eût été trop enfantin et sa voix n’eût pas semblé assez pure ; une clarinette eût mieux convenu sans doute, mais certains sons eussent été trop forts, et aucune des notes les plus douces n’eût pu se réduire à la sonorité faible, effacée, voilée du fa naturel du médium, et du premier si au-dessus des lignes, qui donnent tant de tristesse à la flûte dans ce ton de ré mineur où ils se présentent fréquemment. Enfin, ni le violon, ni l’alto, ni le violoncelle, traités en solo ou en masse, ne convenaient à l’expression de ce gémissement mille fois sublime d’une ombre souffrante et désespérée ; il fallait précisément l’instrument choisi par l’auteur. Et la mélodie de Gluck est conçue de telle sorte que la flûte se prête à tous les mouvements inquiets de cette douleur éternelle, encore empreinte de l’accent des passions de la terrestre vie. C’est d’abord une voix à peine perceptible qui semble craindre d’être entendue ; puis elle gémit doucement, s’élève à l’accent du reproche, à celui de la douleur profonde, au cri d’un cœur déchiré d’incurables blessures, et retombe peu à peu à la plainte, au gémissement, au murmure chagrin d’une âme résignée… Quel poète ! »
« Les Immortels t’emmèneront chez le blond Rhadamanthe,
Aux champs Élyséens, qui sont tout au bout de la terre.
C’est là que la plus douce vie est offerte aux humains ;
Jamais ni neige ni grands froids ni averses non plus ;
On ne sent partout que zéphyrs dont les brises sifflantes
Montent de l’Océan pour donner la fraîcheur aux hommes. »
Homère, L’Odyssée
Christoph Wilibald Gluck (1714-1787), Orphée et Eurydice, Acte 2, Ballet des ombres heureuses, arrangement pour piano interprété par Yuja Wang.
Carlos Schwabe (1866-1926), Champs Élysées (1903). Eurydice après qu’Orphée se soit retourné…?
Plus d’informations sur les Enfers dans l’Antiquité et les Champs Élysées ou Élyséens où se trouve Eurydice…
Le royaume d’Hadès est l’endroit où toutes les âmes vont pour être jugées après la mort. Elles sont retenues comme des ombres sans force ni sentiment, pure présence d’un passé à jamais aboli, et qui peuvent reprendre vie quand on les évoque, en général par une libation de sang à même le sol. Les Enfers sont gardés par un chien à trois têtes, Cerbère.
Les détails de la description du devenir des « âmes » après la mort évoluent avec l’orphisme et Platon. Plusieurs séjours des morts sont distingués clairement et il s’introduit le règlement d’un jugement post-mortem, fondé sur les qualités et les défauts de chacun, devant un tribunal présidé par Minos, Éaque et Rhadamanthe ; les séjours des morts peuvent ainsi être :
Les Champs Élysées, le Pré de l’Asphodèle, l’endroit commun des défunts où les esprits mènent une existence insubstantielle, les Champs du châtiment, lieu où sont châtiées les âmes fautives et le Tartare (endroit le plus profond et le plus sombre des Enfers, où quelques criminels mythiques célèbres reçoivent leur punition).
Hypnos (le Sommeil) et Thanatos (la Mort), son frère jumeau, séjournaient dans le monde souterrain d’où les rêves montaient vers les mortels. Ils passaient par deux portes, l’une faite de corne pour les rêves véridiques, l’autre d’ivoire pour les rêves mensongers.
Les Champs Élysées, appelés aussi « îles des Bienheureux », Homère et Hésiode pensaient que cet endroit était situé dans le lointain Ouest au-delà des flots de l’Océan.
Certains héros en faveur auprès des dieux y étaient, par eux, envoyés au lieu de mourir. Ils y jouissaient d’une entière et plaisante nouvelle vie. Là-bas, c’était le printemps éternel, on y trouvait beaucoup de fleurs, de végétation et d’oiseaux qui symbolisaient la gaieté. Cette région était également traversée par un fleuve appelé le Léthé (le fleuve de l’oubli).
Dans la mythologie postérieure, mais aussi chez Platon (République, X), l’Élysée fut représentée comme une partie des Enfers gouvernée par Rhadamanthe ; c’était le lieu où les âmes vertueuses séjournent temporairement avant d’être réincarnées. Aux frontières des champs Élysées, se trouve le palais d’Hadès et Perséphone. (Wikipédia)