Un jour… Un chef-d’œuvre (151)

“Une pensée est une idée de passage.”

Pythagore (vers 580 ACN- 495 ACN)

 

Feodor Andreyevich Bronnikov (1827-1902), L’Hymne au soleil levant de Pythagore, 1869.

Franz Joseph Haydn (1732-1809), Quatuor à cordes en si bémol majeur Op. 76 n°4 « Lever de Soleil« , interprété par le Quatuor Amadeus.

1. Allegro con Spirito 2. Adagio 8:13 3. Menuet. Allegro 14:25 4. Finale. Allegro ma non troppo 18:26

« Pythagore serait né vers 580 ACN dans l’île de Samos et aurait vécu plus de 80 ans. Son nom lui vient de la Pythie de Delphes qui annonça à ses parents qu’ils auraient un enfant qui l’emporterait en beauté et en sagesse sur tous les autres.

Aucune trace d’écrits ne persiste de sa main et ses biographies les plus importantes ont été rédigées plus de huit siècles après sa mort. L’histoire de sa vie tient donc pour beaucoup de la légende.

Les textes anciens racontent qu’enfant, son intelligence est connue de toute la Grèce. Vers 17 ans, il semble avoir remporté des compétitions de boxe (pugilats) aux Jeux olympiques. À 18 ans, il part découvrir le monde et s’initier auprès des plus grands maîtres. Il étudie les sciences, la philosophie et la religion. Il voyage notamment en Égypte, en Phénicie, en Thrace, à Delphes, à Babylone et en Crête. Mais c’est à Crotone, en Calabre, qu’il s’installe et fonde une école qui devient, en réalité, une sorte de confrérie proche d’une secte. Cette communauté, à demi religieuse est divisée en quatre niveaux correspondant à chaque degré d’initiation, des simples postulants aux « mathématiciens ». Ces derniers reçoivent leur enseignement de Pythagore lui-même.

Les Pythagoriciens vivent ensemble et partagent leurs biens. Ils croient en la métempsychose (transmigration de l’âme vers d’autres corps, notamment dans un animal, en attendant la réincarnation), ce qui les conduit à être végétariens et impose aux mathématiciens de porter de longues tuniques blanches dans un tissus exclusivement composé de matières végétales. Ils doivent se conformer à un ensemble de règles strictes et d’exercices physiques et spirituels. Certains sont soumis à la discipline du silence.

Malgré ce mysticisme qui tend au syncrétisme religieux, le nom de Pythagore reste attaché aux mathématiques, notamment pour le théorème qui porte son nom. Il fonde sa théorie sur la correspondance entre les nombres, en particulier les nombres entiers, et l’harmonie de la nature. Il établit également des rapports entre les rythmes musicaux et les nombres ainsi qu’entre la longueur d’une corde et la hauteur du son qu’elle émet. Ces rapports mathématiques entre les intervalles musicaux sont rapprochés des proportions qui régissent l’univers… c’est le concept de la Musique des sphères∗.

Dans ce tableau, Bronnikov représente Pythagore et ses disciples les plus fervents, les mathématiciens, assemblés sur le haut d’une colline, face à la mer, chantant, prient et jouant de la musique en hommage au soleil levant. Cette ode mystique évoque l’idée d’héliocentrisme, prônée, semble-t-il, par Pythagore bien avant Copernic: le soleil, une sphère parfaite, se situe au centre de l’univers (sic). De plus, il pensait que le mouvement des planètes et des étoiles jouait une gamme complète et harmonique. La musique possède donc une dimension cosmique: « Ce que tu regardes en levant les yeux est la Beauté organisée », disait-il. »

Dimitri Casali et Caroline Caron-Lanfranc de Panthou, L’Antiquité éternelle par les peintre, Paris, Éditions du Seuil, 2010, p. 60.

∗ C’est moi qui ajoute.

Pour en savoir plus!

Pythagore est probablement le premier à associer étroitement la musique et l’astronomie. Son intérêt pour la musique le pousse à définir la gamme qui porte son nom suivant deux principes : il n’existe que 7 intervalles entre les notes d’une gamme et la somme de ces intervalles est égale à 6 tons. Sa fascination pour les rapports numériques dans les harmonies musicales l’amène à tenter d’expliquer de la même manière les autres phénomènes de la nature, y compris le cosmos. Il utilise le mot « cosmos  » pour désigner un univers ordonné et harmonieux. La dualité entre l’harmonie et l’astronomie fut ainsi établie par l’école Ionienne de Pythagore au 6e siècle avant notre ère.

La Terre est considérée comme un corps céleste isolé dans l’espace, au centre d’une sphère. Les planètes ne sont pas toutes à la même distance de la terre, posées sur des anneaux circulaires opaques. L’ordre des planètes fait appel à une hiérarchie fondée sur la mythologie, dans l’ordre : Terre – Lune – Vénus – Mercure – Soleil – Mars – Jupiter – Saturne – Fixes (étoiles). Une fois cet ordre établi, il faut donner des distances. La méthode va donc consister à deviner la loi des distances plutôt que de la calculer, suivant le principe de Pythagore.

Etant donné qu’il y a autant d’intervalles musicaux qu’il y a de planètes, il suffit de placer celles-ci suivant les rapports harmoniques. Les sept planètes sont comme les sept cordes d’une lyre. En fixant la valeur du ton comme étant égale à la distance Terre – Lune, les Pythagoriciens établissent ainsi la première échelle planétaire. D’après eux toutes les planètes, y compris le soleil et la lune, tournent autour de la terre à vitesse constante suivant des orbites obéissant aux mêmes rapports numériques que la gamme. Chacune d’elle produit un son correspondant au si pour Saturne, do pour Jupiter, ré pour Mars, mi pour le soleil, fa pour Mercure, sol pour Vénus et enfin la pour la Lune. […]

Pythagore et les principes de l’acoustique, d’après Boèce (480-524)

Sans plus tenir compte des appréciations fournies par des oreilles, Pythagore décida de n’employer que des rapports mathématiques pour la division de la règle des sons. Il cherchait de quelle manière il apprendrait les divisions fixes et constantes des rapports harmoniques quand, passant devant un atelier de forgerons, il entendit que les marteaux résonnaient en tirant une sorte d’accord. Il pensa que la diversité des sons provenaient des forces respectives de ceux qui frappaient. Il leur demanda d’échanger leurs marteaux mais les mêmes sons accompagnaient les marteaux une fois échangés.
Il examina alors le poids des marteaux qui étaient au nombre de cinq.
Ceux donnant l’accord de diapason (octave) étaient d’un poids double l’un par rapport à l’autre.
Celui qui était double de l’autre comportait les 4/3 d’un troisième et donnait le Diatessaron (quarte).
Mais par rapport à un autre avec lequel il formait l’accord de Diapente (quinte), il trouve pour ce marteau la valeur de poids de 3/2.
Les deux marteaux qui avaient les rapports 4/3 et 3/2, pesés exactement, gardèrent l’un par rapport à l’autre le rapport de 9/8 et donnaient entre eux la Sesquioctave (ton).
Quant au cinquième marteau qui était en désaccord avec tous, on le laissa tomber.

Pythagore fut ainsi le premier à trouver selon quel rapport chaque accord des sons entre eux était uni.
De retour chez lui, Pythagore examina si la raison des accords consistait toute en ces proportions :
En adaptant à des cordes égales des poids de valeurs différentes dans les mêmes proportions,
En variant la longueur de cordes auxquelles étaient attachés des poids identiques,
En établissant des chalumeaux de longueurs différentes suivant les mêmes proportions.
Ainsi, il en acquit la certitude et énonça la règle qui permet d’obtenir les rapports harmoniques.

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