Un jour… Un chef-d’oeuvre! (42)

«Quand les voix des onagres* répondent au cornet à bouquin qui appelle…»
Voltaire, « Le Monde comme il va », 1746.

42a.Artiste vénitien anonyme, Concerto, vers 1530-40

Artiste vénitien anonyme, Concerto, vers 1530-1540.

Roland de Lassus (1532-1594), Suzanne un jour, Diminutions pour cornet à bouquin de Giovanni Bassano (1568-1617), interprétée par William Dongois et Le Concert Brisé (vidéo réalisée par JMO)

« Le Cornet à bouquin tire son nom du normand, bouque, « bouche« . Il s’agit d’un aérophone à embouchure. Connu en Europe depuis l’époque médiévale, le cornet à bouquin fut surtout utilisé aux 16ème et 17ème siècles. Il était formé d’un tube en ivoire ou en bois, parfois légèrement courbe, à section octogonale. Le morceau de bois à partir duquel il était était réalisé était coupé en deux moitiés symétriques, évidées et collées ensemble, puis réunies par un revêtement de cuir noir ou de parchemin. Le tube était muni de sept trous (six au-dessus et un en-dessous pour le pouce, NdR) pour les doigts et d’une embouchure. Il existait plusieurs sortes de cornets à bouquin, correspondant à des registres différents. Le cornet « muet », ainsi dénommé en raison de sa sonorité douce mais faible, était caractérisé par son tube droit et son embouchure creusée directement sur la face externe de l’instrument.

Largement utilisé au 16ème siècle pour soutenir les basses et les bombardes, le serpent produisait, quant à lui un son puissant; son long tube en bois avec six ou neuf trous était revêtu de cuir et incurvé en forme de S double.

Le son du cornet à bouquin était proche de celui de la voix humaine, qu’il soutenait ou remplaçait souvent dans la polyphonie chorale. Au 16ème siècle, il fut l’un des instruments les plus appréciés, pour sa précision sonore comme pour son aptitude à reproduire les ornements vocaux. Sa difficulté d’utilisation en restreint cependant l’usage à un petit nombre de virtuoses, sollicités par toutes les cours d’Europe et généreusement payés. Son âge d’or s’acheva vers 1630, lors de la peste de Venise, où résidaient les plus grands virtuoses. Il fut également concurrencé par la mode croissante du violon. Bien que son usage y soit limité à l’accompagnement du chant et de la musique de cérémonie, le cornet à bouquin s’est maintenu dans le nord de l’Europe pendant une bonne partie du 18ème siècle.»

Alberto Ausoni, La musique, repères iconographiques, Guide des Arts, Paris, Éditions Hazan, 2006, p. 346.

SUZANNE UN JOUR, texte de la chanson de Roland de Lassus

Suzanne et les Vieillards est un épisode biblique relatant l’histoire d’une jeune femme, Suzanne qui, observée alors qu’elle prend son bain, refuse les propositions malhonnêtes de deux vieillards. Pour se venger, ceux-ci l’accusent alors d’adultère et la font condamner à mort, mais le prophète Daniel, encore adolescent, intervient et prouve son innocence. Il fait condamner les vieillards. L’épisode se trouve au chapitre 13 du Livre de Daniel.

Suzanne un jour d’amour sollicitée
Par deux vieillards convoitant sa beauté
Fut en son cœur triste et déconfortée
Voyant l’effort fait à sa chasteté.
Elle leur dit : si par déloyauté
De ce corps mien vous avez jouissance,
C’est fait de moi ! Si je fais résistance,
Vous me ferez mourir en déshonneur :
Mais j’aime mieux périr en innocence
Que d’offenser par péché le Seigneur.

42g. Artemisia Gentileschi, Suzanne et les vieillards, 1610.

Artémisia Gentileschi (1593-1652), Suzanne et les vieillards, 1610.

  • Onagre: L’Hémione, Onagre ou âne sauvage d’Asie est une espèce de mammifères équidés. C’est un âne sauvage répandu autrefois dans une grande partie de l’Asie, de la Palestine à la Chine. Dans la Bible (hébreu: פרא, grec: onos agrios / όνος άγριος), l’onagre représente la faune du désert (Livre de Daniel)

42. Onagre ou Hémione