Le dernier jour du festival est toujours délicat ! Il faut un bouquet final de taille, mais il faut aussi de la découverte. Pour l’ultime séance, je voulais un symbole fort et c’est un concert des lauréats 2016 du Concours de piano de Liège que j’avais organisé. J’y reviens. Pour la découverte, comme la cerise sur un gâteau, j’avais invité le formidable hautboïste Sylvain Cremers à interpréter, dans un concert commenté et illustré iconographiquement, les six rares Métamorphoses de Benjamin Britten… un voyage dans la mythologie et les sonorités envoûtantes du hautbois.
Toutes les Photos sont d’Armand Mafit
Six Métamorphoses d’après Ovide pour hautbois solo (1951) est une œuvre singulière, traitant un instrument mélodique comme un véritable soliste. L’œuvre déroutante et ouvertement programmatique, puisque Britten lui-même a laissé dans les titres de ses pièces quelques indications essentielles. Il exploite quelques unes des plus célèbres métamorphoses du poète latin, Ovide (-43 – +17). Si l’auteur de l’Art d’aimer utilisa une bonne part de son talent littéraire à rédiger quinze livres sur le sujet des métamorphoses, ce n’est pas simplement pour le plaisir de récits fantastiques, c’est surtout qu’à travers les diverses transformations des personnages se trouve des archétypes humains… aussi valables aujourd’hui qu’hier.
J’avais donc envie de renouveler l’expérience du concert commenté avec Sylvain. Nous avions déjà réalisé une séance sur ce sujet il y a bien longtemps dans le cadre des conférences de la Fnac. Mais cette fois, j’avais aussi envie d’illustrer les six pièces par quelques tableaux représentatifs des dites métamorphoses qui furent des sujets de choix pour les peintres de toutes les époques.
Séance permettant donc de combler un vide dans le souvenir ou la culture des jeunes et des moins jeunes car si l’on peut évidemment écouter la pièce sans rien savoir de la mythologie, il est très profitable de reconnaître, dans la mise en œuvre de la musique, les intentions évocatrices du compositeur. Le lieu n’est pas, dans ce bref compte-rendu, de détailler le contenu de chaque pièce d’autant qu’il était aussi question d’expliquer l’instrument, d’en montrer le subtilités et le fonctionnement, ce que Sylvain adore faire. Ce fut donc une heure d’interactivité entre le public, le musicien et moi… un moment de bonheur !
Les pièces sont d’une extraordinaire difficulté, tant dans les nuances des phrasés des morceaux lents (Pan, Niobé, Narcisse) que dans la rythmique quasi stravinskienne (Phaëton, Bacchus), le dédoublement quasi polyphonique des miroirs et échos de Narcisse ou la vélocité liquide (Aréthuse), un tour de toutes les possibilités de l’instrument.
Sylvain Cremers est exceptionnel comme toujours, on le savait déjà, et se double d’un magnifique pédagogue pour la plus grande joie des auditeurs venus nombreux pour la découverte d’une œuvre qui, pour beaucoup, était inconnue. Le bonheur de partager la passion et la musique se prolongeait au-delà des 80 minutes de la séance par une invitation de notre musicien à montrer cet étrange animal qu’est le hautbois aux amateurs émerveillés.
Le bouquet final faisait la part belle à la jeunesse en invitant les lauréats du Concours de piano de Liège, session 2016, à se produire sur notre scène. On se souviendra que 2016 fut l’année des vingt ans du concours liégeois, un tremplin vers le Concours Reine Élisabeth, du moins pour sa catégorie D, et d’un niveau exceptionnel. C’était donc une joie de retrouver ces formidables jeunes talents dans un programme que je n’avais balisé que par un minutage, laissant chacun libre de jouer ce qu’il désirait… le choix d’une œuvre à présenter révèle aussi la personnalité d’un musicien !
de gauche à droite: Tianhong Yang, Emmy Wils, Valère Burnon, Johan Ferreira Perdigao et Kyllian Najera Houbiers
Ce fut un moment exceptionnel de bout en bout. Devant une salle médusée par le talent de ces jeunes gens, les applaudissements redoublaient à chaque prestation. Il n’est pas dans mon intention, ma position de président du jury du concours ne l’autorisant pas, de vous faire un compte-rendu critique de chacun, je le leur ai fait en privé, je me borne tout simplement à vous donner les noms et quelques photos de chaque pianiste présent hier en affirmant la véracité d’une partie de la phrase de Corneille qui proclame que la valeur, ici le talent, n’attend pas le nombre des années…
Kyllian Najera Houbiers
Johan Ferreira Perdigao
Ce fut pour moi, je crois n’avoir pas été le seul, un vrai bonheur d’écouter ces prestations souvent exceptionnelles, toujours très touchantes. Merci à tous et bon vent dans la vie et la musique !
Valère Burnon
Emmy Wils
Tianhong Yang
Quand les dernières notes s’envolent, il reste un sentiment de nostalgie, comme lorsqu’une fête s’achève, il y a aussi une fatigue certaine, mais surtout un immense bonheur d’avoir tant vibré ces cinq derniers jours. Encore un dernier billet, demain, en guise d’épilogue et de bilan à propos de cette édition du Festival Voyages d’été 2017… qui fut, décidément, d’un niveau vraiment exceptionnel ! Vive la musique!
Comme je vous l’ai dit de vive voix, ce final par les jeunes talents est au Voyage d’été, que vous avez organisé, ce qu’un Bouquet final est au Feu d’artifice. Quel talent cette jeunesse.
Merci Monsieur Onkelinkx de nous faire decouvrir ces spectacles.