De Vivaldi à Amazing Grace… Festival J+2

La deuxième journée de notre Festival Voyages d’été 2018 débutait par une formidable rencontre avec l’auteure Christiana Moreau autour de son premier roman, La Sonate oubliée.

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La Sonate oubliée, photographies de Jean Cadet

Je vous ai déjà parlé de cet ouvrage car nous avions organisé, en mars dernier au Chiroux, une rencontre-concert-commenté à ce propos. Nous avions été tous tant enthousiastes que j’avais eu envie de refaire cette séance particulière dans le cadre de notre festival. Voici, moyennant quelques adaptations, ce que j’écrivais il y a quelques mois, car, forcément, rien n’a changé dans la démarche et l’ouvrage de Madame Moreau est indémodable !

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La Sonate oubliée, traite en effet de la musique baroque à Venise et d’une étrange connexion entre l’époque de Vivaldi et une jeune violoncelliste de 17 ans vivant à Seraing. Une mystérieuse sonate pour violoncelle se retrouvait par miracle sur le marché de la petite ville de bord de Meuse… commençait alors une aventure transversale et bouleversante entre le destin d’une élève pensionnaire de l’Ospedale della Pietà et celui de la jeune fille d’aujourd’hui. Tout cela se combine merveilleusement en un pont a priori improbable entre la situation de la ville sinistrée économiquement, lieu des anciennes prospérités métallurgiques de la région liégeoise, évoquant la touchante simplicité des habitants des quartiers les plus pauvres du 21ème siècle et le prestige doré et poétique de la Sérénissime du 18ème siècle empli de musiques, de masques et d’art. Tout cela s’emboîtait comme par miracle sous la plume dynamique et séduisante de Madame Moreau.

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Je ne vous en dit pas plus car dès que j’ai ouvert l’ouvrage de 250 pages au début de l’été 2017, je l’ai littéralement dévoré et, une fois la lecture achevée, j’ai refermé La Sonate oubliée avec beaucoup d’émotion comme lorsqu’on s’attache et s’identifie aux personnages, à toute leur humanité et qu’on regrette de devoir les quitter si vite tant ils nous ont ému. Je vous laisse donc le soin et le plaisir de le lire.

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Cependant, j’étais convaincu qu’il fallait faire quelque chose pour diffuser un maximum ce premier roman si réussi et superbement documenté. Qui plus est, tout en lisant l’ouvrage, je ne pouvais m’empêcher de penser à une jeune violoncelliste extrêmement talentueuse que j’avais eu brièvement dans ma classe au conservatoire et à qui j’avais proposé un récital à notre Festival Voyages d’été 2016, Leonor Swyngedouw… sérésienne !

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… L’Histoire aurait été trop belle si… Christina Moreau avait eu en tête notre jeune musicienne ! Et bien ce fut le cas ! L’auteure me confia que, connaissant de longue date Leonor, elle était venue écouter le récital évoqué plus haut et que Leonor n’était pas pour rien dans le portrait de sa Lionella, l’héroïne du roman. Un chose s’imposait donc !… Demander à Leonor de venir jouer une sonate de Vivaldi lors d’un concert-conférence-rencontre où l’auteure, la musicienne et moi-même tournerions autour du roman et de la musique du Prêtre roux.

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Leonor accepta immédiatement et j’ai alors contacté l’extraordinaire claveciniste Edward Van Marsenille, qui a lui aussi foncé dans le projet. Ayant déjà travaillé avec notre violoncelliste, il connaissait son talent. Pour ma part, j’ai laissé à Leonor le choix de la sonate qu’elle jouerait et que j’analyserais. Elle a jeté son dévolu sur la Sonate en la mineur RV 44. Ce n’est certes pas la Sonate oubliée, car il s’agit-là d’une fiction, mais c’est l’une des plus belles pièces écrite par Vivaldi pour le violoncelle et la basse continue.

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Refaire cette séance au Festival était un grand bonheur et les mélomanes sont venus nombreux pour écouter cette rencontre formidable. Très disponible et chaleureuse, Chrisitana Moreau s’est pliée au petit jeu de l’interview. En toute simplicité, elle nous a fait part de ses coups de cœur à propos de sa ville, de Venise, de ses personnages, de l’Ospedale et de son maître de violon et de la musique. Artiste elle-même, elle comprend avec une rare pertinence les subtilités de la musique, de l’esthétique baroque et de l’art de la composition.  Leonor et Edward ont été formidables, habitant la sonate avec plus de force et de présence encore que lors de notre première présentation ! Quel talent, une fois encore ! Leonor sera, j’en suis sûr, une très grande violoncelliste et la passion qui l’anime est vraiment très belle.

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Elle vit sa musique avec une rare intensité. À ce jeu, Edward Van Marsenille n’a rien à lui envier. Subtilité et créativité de la basse continue, finesse, un vrai régal. Et pour moi, confort suprême, une magnifique complicité de notre duo dans la partie commenté… Les arts s’alliaient à nouveau et se croisaient pour notre plus grande joie ! Quelle belle histoire ! Et quelle chance de vivre ces moments inespérés !

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Démonter le clavecin en un temps record, libérer la scène et c’est déjà le deuxième rendez-vous de la journée. Un caractère très différent a soudain habité la Salle 11. Sonnez les cuivres, un titre que j’avais donné pour annoncer le récital très original d’un trio de cuivres. Sur l’estrade, d’exceptionnels musiciens, une fois encore, jouissant d’une expérience de leur instrument absolument incomparable. Sous la coupole de Fabienne Crutzen au piano, François Ruelle à la trompette, David Lefèvre au cor et Gérald Gérard alternaient les trios et solos avec un bonheur absolument incroyable.

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Sonnez les Cuivres, photographies d’Armand Mafit

Toutes les émotions étaient de sortie pour nous offrir un récital chatoyant, virtuose et émouvant. Si quelques compositeurs nous sont familiers, comme F. Poulenc, M. Ravel, J. Françaix et Eugène Bozza, on connaît nettement moins la pourtant superbe romance pour trombone et piano d’Axel Jorgensen ou le trio baroque d’un compositeur du 17ème siècle, Daniel Speer ! Belles découvertes et surtout géniales nuances dans les phrasés, les timbres et la clarté polyphonique !

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Pour laisser ses collègues se reposer dans la chaleur intense de la salle, Fabienne Crutzen proposait quelques pièces pour piano seul. Une superbe étude de concert du trop peu connu Ernesto Nazareth, compositeur brésilien de la génération de Richard Strauss. Très belle découverte aussi, ces deux pièces tirées de « L’Enfance de l’Art » du compositeur verviétois, pédagogue célèbre et père de la chanteuse trop tôt disparue, Maurane, Guy-Philippe Luypaerts.

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Un récital plein de joies et riche en couleurs qui se terminait, tous en scène pour une nouvelle découverte, Récréation de Pierre Gabaye. Très enthousiaste, le public réclame un bis accordé de bonne grâce par notre quatuor. Cette fois, c’est un arrangement d’un des chants religieux les plus célèbres du monde anglophone devenu une véritable mélodie populaire que chacun a sur le bout de la langue, Amazing Grace ! Je vous laisse ici le lien Wikipédia afin que vous puissiez vous remémorer l’histoire singulière de ce chant dont, comme beaucoup de mélomane et musiciens, je ne connaissais plus l’origine. Un jour où l’on n’apprend rien est un jour perdu !

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Restait une troisième mi-temps de taille puisque nous avions décidé de diffuser le match Angleterre – Belgique à l’issue du concert, l’occasion d’une nouvelle convivialité qui s’est terminé par la victoire belge… décidément la journée fut très riche en joies et émotions !