S’il est un sujet que les Liégeois commentent tant et plus ces derniers temps, c’est celui de l’installation d’une ligne de tram reliant Sclessin à Coronmeuse. Le tram participe à une grande redynamisation de notre ville qui, ces dernières décennies, a vu son panorama se moderniser et se doter d’infrastructures nouvelles ou superbement restaurées. Inutile de revenir sur la belle gare Calatrava, sur la Boverie, son musée et sa passerelle magnifique, sur le Grand Curtius, l’Opéra royal de Wallonie, la Salle philharmonique… j’en passe ! Tout cela donne à Liège un visage nouveau dont le Liégeois peut être fier. Non, la région liégeoise n’est pas seulement un refuge de brigands de la haute finance !
Mais ce n’est pas tant le tram en lui-même qui est discuté, il semble faire l’unanimité auprès des habitants de la Cité ardente, c’est surtout les terribles désagréments que suscitent ces travaux gigantesques dès à présent et pour… près de trois ans ! Les usagers des transports en commun font grise mine en voyant que beaucoup des lieux d’embarquement au centre-ville sont supprimés ou déplacés à plusieurs centaines de mètres de leur lieu initial, laissant les personnes à mobilité réduite sur le carreau en ne parvenant pas à rallier à pied le nouveau point de départ. Presque tous les jours, des lignes de bus sont déviées, temporairement supprimées ou réduites dans leur itinéraire. Cela n’est pas sans poser de véritables problèmes pour la vie quotidienne de nombreux citadins usagers, pourtant, des solutions de mobilité douce… et que dire du commerce au centre-ville qui bat sérieusement de l’aile provoquant le départ précipité de plusieurs grandes enseignes !
Pour ce qui est des automobilistes, l’enfer est quotidien et les bouchons occupent la plupart des axes toute la journée durant. Il est devenu angoissant de prévoir un trajet automobile pour atteindre le centre de Liège. Des dizaines de routes sont fermées, des chantiers en plein milieu des voies rapides (devenues très lentes) se multiplient, dans lesquels on reste parfois des semaines sans observer qu’un travail s’accomplit… ! On pourrait d’ailleurs élargir l’angoisse à la Wallonie entière qui semble à deux doigts de la paralysie presque tous les jours, tant dans les villes que sur les autoroutes. Les travaux interminables et accidents graves réguliers sur toutes les voies en même temps ralentissent nos déplacements. Il suffit d’écouter les litanies du centre PEREX qui intervient sur les ondes radio toute la journée pour faire défiler une liste terrifiante d’incidents plus ou moins importants ou graves.
On me rétorquera qu’il faut laisser la voiture, prendre un vélo ou marcher. J’applaudis des deux mains même s’il est illusoire de penser que c’est possible pour tout le monde. La nature du déplacement, la santé, l’âge et la forme physique des usagers n’autorisent pas toujours l’adoption de ces magnifiques moyens. Les dernières statistiques révélées par la presse la semaine dernière font d’ailleurs mention d’une nette augmentation des accidents impliquant des vélos ou des usagers faibles.
Cependant, il y a des situations professionnelles qui ne peuvent se passer d’un véhicule, soit qu’ils transportent du matériel impossible à véhiculer en transport en commun, à vélo ou à pied, soit que les horaires de déplacement impératifs obligent à prendre une voiture pour tenter d’arriver à l’heure. Et il n’est pas toujours aisé de regrouper les déplacements pour minimiser le temps et les kilomètres parcourus. Je fais partie de ceux-là ! Quand je donne cours à Liège jusqu’à midi et que je dois commencer à Mons à 14H30, je n’ai aucune autre alternative que de prier pour que l’autoroute me permette d’arriver à bon port en temps et en heure. Le train ne le permet pas, seule la voiture peut le faire ! Cela peut, le cas échéant, ajouter un certain stress à la vie professionnelle. Dans mon métier, travaillant pour de nombreuses institutions, je suis obligé d’être tout le temps sur la route ce qui ne me déplaît pas dans des conditions « normales ». Mais aujourd’hui, on vous regarde de travers si vous roulez en voiture, on vous culpabilise. C’est facile lorsque le métier qu’on accomplit est sédentaire, mais quand il faut bouger tout le temps, ce n’est pas si simple !
Mais je veux ici être positif et considérer le tram liégeois comme une excellente nouvelle et une aubaine, d’autant que la fréquence des rames sera élevée et que de grands parkings de délestage seront présents. Dans la présentation, sur l’Espace Tivoli, de la maquette grandeur nature de la rame, on est impressionné et fier de voir à quoi cela ressemblera et on se dit que ce sera vraiment un plus pour notre ville. Je me dis aussi que les désagréments actuels sont un mal nécessaire pour un avenir meilleur.
Quelques chiffres donnés par le dépliant « Le Tram à Liège, c’est parti ! » montrent l’ampleur de la tâche et le sérieux du projet :
Agenda :
Avril 2020 : 1ère pose de voie (rue Léopold)
Mai 2021 : Arrivée du premier tram
Mars 2022 : Fin des travaux d’équipements
Août à Septembre 2022 : Marche à blanc
Octobre 2022 : Mise en service commerciale.
Infrastructure en chiffres :
23 stations, 11,7 km de ligne, 3 ponts modifiés, 79 carrefours à feux, 2 parkings relais avec un total de 1436 places, 240000 m² de travaux d’aménagements urbains, 1 centre de maintenance et de remisage, 3 tronçons sans ligne aérienne.
La rame en elle-même :
8 doubles portes par côté, 2 emplacements pour malvoyants avec espace pour un chien et un accès adapté, 3 emplacements dédiés aux personnes à mobilité réduites et aux poussettes, 310 passagers par tram, 64 tonnes de poids pour une rame, 45 mètres de longueur, 3,60 mètres de hauteur, 2,65 mètres de largeur, 4,30 minutes de fréquence en heures de pointe, 62 places assises par tram, 45 cm de largeur des sièges.
Espérons enfin que les dégâts collatéraux ne plongeront pas une part de la population liégeoise et des environs dans la tourmente. Une fois encore, le commerce liégeois souffre et l’abondance de centres commerciaux en périphérie détourne le client du centre historique. Certains quartiers sont dans un état déplorable et il est grand temps de redynamiser tout cela sans attendre trois ans ! Le sentiment d’insécurité et de pauvreté galopante augmente et est aussi un défi majeur pour nos élus. J’espère que le tram ne mettra pas sur le côté ces aspects vitaux pour une ville belle et agréable pour tous.
Je pense aussi, et en particulier, au plan des infrastructures proposé dès à présent et qui semble déplacer Liège Expo de Coronmeuse (un vaste plan d’aménagement de ce quartier de l’ancienne patinoire est en cours) vers les lieux du Marché de Liège… où se trouvent les locaux de l’Université du Troisième Âge. Cela pourrait être une aubaine pour nos 3800 membres si nos infrastructures sont préservées… ce que j’espère de tout cœur, ou une grande catastrophe dans le cas contraire ! Qui vivra verra… !
