La ville d’Echternach (5200 habitants en 2005), au Grand Duché de Luxembourg, est située dans l’extrême est du pays, au cœur de la « Petite Suisse » luxembourgeoise, aux bords de la Sûre qui forme la frontière avec l’Allemagne depuis que le Luxembourg fut élevé, en 1815, au rang de Grand-duché. La proximité de Trèves, ancienne capitale provinciale romaine, a exercé une influence durable sur l’histoire de la localité.

Son nom remonte probablement à celui d’un éleveur de chevaux qui, au début de l’ère chrétienne, s’était fixé avec sa famille sur cette terre fertile.
Vers 50 PCN, fut établie au lieu-dit « Schwarzacht », près du lac de la ville, une importante villa romaine dont les ruines ont pu être partiellement dégagées à partir de 1975. La demeure principale, aux allures de palais, s’étendait sur une surface importante de 118 mètres de long sur 62 mètres de largeur. Manifestement, la villa fut reconstruite et agrandies plusieurs fois avant de tomber en ruine au cours des invasions barbares du début du 5ème siècle.
Mais le fait décisif pour le développement ultérieur de la ville, ce fut l’arrivée vers la fin du 7ème siècle du moine anglo-saxon Willibrord venu là comme missionnaire. Il devint, tout jeune, archevêque après plusieurs séjours à Rome. Il travaillait en collaboration avec les chefs du palais mérovingien dont l’un des descendants fut, d’ailleurs, l’empereur Charlemagne. Il créa alors une église bien structurée en faisant appel aux « forces » locales. Comme il avait le soutien des souverains de la localité. Il y fonda ensuite une communauté monastique de bénédictins et érigea une spacieuse église à l’endroit actuel. Le succès spirituel fut au rendez-vous puisque de nombreux pèlerins se mirent à passer par Echternach. Willibrord voyagea ensuite dans de nombreux pays puisqu’on en trouve des traces jusqu’au Danemark, mais lorsqu’il mourut en 739, il était revenu au bercail, dans le couvent qu’il avait fondé au bord de la Sûre. Il fut tout naturellement inhumé dans l’église qu’il avait fait construire et y fut vénéré comme un saint.
Sous le règne de Charlemagne l’abbaye de la ville fut affublée du titre impérial et les bénédictins furent remplacés par des chanoines séculiers qui vivaient sous la direction d’un abbé laïc. Ce n’est que vers l’an mille que les moines purent réintégrer les lieux et l’abbaye redevint florissante. Si riche, d’ailleurs, que l’empereur Otton III autorisa les moines à battre monnaie. Un incendie ravagea l’abbaye en 1016 emportant avec lui nombre d’ouvrages de valeur que les moines enlumineurs conservaient jalousement. Dès la reconstruction, les moines artistes reprirent leurs activités offrant au monde l’un des plus beaux manuscrits enluminés, le Codex Aureus conservé aujourd’hui à Nuremberg.

La localité qui s’était développée à côté de l’abbaye reçut une charte d’affranchissement en 1236, mais l’abbé gardait d’importants droits. Ainsi, sur la place du marché, la Croix de Justice rappelle que les ecclésiastiques avaient dans leurs attributions celui de rendre la justice.
L’église abbatiale fut à la pointe des évolutions stylistiques et refondue régulièrement. Ainsi depuis les vestiges mérovingiens, on peut distinguer la crypte romane qui contient aujourd’hui encore les reliques de Willibrord.
Au 13ème siècle on dota l’église de voûtes ogivales gothiques et les baies vitrées furent adaptées au nouveau style. Au 17ème siècle, les abbés érudits et amateurs d’art ajoutèrent plusieurs chapelles le long des nefs et près du cœur. On y trouve des reliques de Saint Sébastien qui était invoqué contre la peste. Ces reliques attiraient elles aussi de nombreux pèlerins.
En 1794, la ville d’Echternach fut prise par les troupes françaises qui, avec une partie de la population, pillèrent l’abbaye. Même le tombeau de Willibrord fut ouvert et profané. Mais les moines avaient fui en mettant en sécurité leurs objets de valeur, cependant ce pillage fut l’une des pertes artistiques les plus irréparables pour la ville et le pays tout entier. Enfin, en 1797, la mise en vente des restes de l’abbaye mit une fin définitive à la vie bénédictine sur les bords de la Sûre. C’était aussi la fin de la seigneurie d’Echternach puisque les moines exerçaient depuis toujours leur droit seigneurial sur les terre avoisinantes.
Jusqu’au milieu du XIXème siècle, l’église va servir de tout sauf de lieu de culte (champ d’exercices militaires, faïencerie, …). Après de longues tractations, le bâtiment revint à la Fabrique d’Eglise d’Echternach. Une association de la population, l’œuvre de Willibrord, prit en main la reconstruction. La consécration de l’église eut lieu en 1868, mais ce n’est qu’en 1906 que les restes du saint purent à nouveau être transférés dans la crypte, sa sépulture originelle.
En 1939, le sanctuaire reçut le titre de Basilique pontificale, mais en 1944, les troupes allemandes firent sauter la partie occidentale de l’église, seuls le chœur et la crypte étaient intacts. A la fin des hostilités toute la ville ressemblait à un champ de ruines. La reconstruction de la basilique fut alors considérée comme un projet national. De grands architectes locaux se mirent à l’œuvre. A l’extérieur, les quatre tours furent l’objet d’une nouvelle construction, à l’intérieur, un plafond à poutres remplaçait désormais les voûtes gothiques, sauf dans les nefs latérales. En 1953, l’église fut à nouveau consacrée.
On mit également de nombreuses années à reconstruire la ville. Même si les habitants déplorent encore aujourd’hui la perte d’un patrimoine architectural historique exceptionnel, le centre-ville fut reconstruit à l’identique, sur les modèles anciens. Et de fait, les ruelles, places et voies de circulation piétonnes sont d’une beauté et d’une propreté exceptionnelle.
Et malgré cette histoire tourmentée, la visite de la ville est riche en découvertes. En témoigne en vrac (il serait trop long de tout détailler) les sept tours de l’enceinte médiévale, l’orangerie rococo dans le parc municipal, la place du marché et son Palais de justice, sans compter les nombreuses attractions touristiques habituelles des villes ; musées, commerces, restaurants, tavernes, kiosques à musique, …
La ville est aussi connue dans le Luxembourg et toute l’Europe pour sa procession de printemps, dansée (!). Traditionnellement, les participants opéraient une marche spéciale qui consistait à faire trois pas en avant suivis de deux pas en arrière. Aujourd’hui, il s’agit plus d’une danse que de cette marche, certes rythmée, mais bien fatigante sans doute.
Au-delà du centre ville de nombreuses promenades au bord de la Sûre ou sur les hauteurs de la ville offrent d’idylliques paysages. Voici encore quelques photos, pour le plaisir…

