Dans le cadre de la réhabilitation de compositeurs de nos régions qui ont été largement oubliés par les interprètes et les firmes de disques, il convient de saluer l’initiative du label belge Cyprès qui vient de publier, tout récemment, un superbe cd des deux sonates pour violon et piano de Victor Vreuls (1876-1944) magistralement interprétées par Eliot Lawson (violon) et Diane Andersen (piano).
Victor Vreuls est donc né à Verviers le 4 février 1876. Il commença ses études musicales au Conservatoire de sa ville natale, les continua au Conservatoire de Liège avec Sylvain Dupuis et Théodore Radoux puis les acheva à Paris, à la Schola Cantorum, où il devint un fervent disciple de Vincent d’Indy.
Après avoir exercé successivement les fonctions de professeur d’alto et d’harmonie à la Schola, il fut appelé à la direction du Conservatoire de Luxembourg en 1905. Il en assuma les fonctions avec autorité et fermeté jusqu’en 1925, époque où il abandonna prématurément son poste à la suite de certaines divergences qui l’opposèrent aux autorités locales. A la Société des Auteurs, où il occupa longtemps une place importante à la tête du Comité national belge, son action s’exerça efficacement en faveur des compositeurs belges et français. Puis, en 1925, il fut élu membre de la classe des Beaux-Arts, puis Directeur de sa classe, en 1934, à l’Académie royale de Belgique. Il est mort à Bruxelles, le 26 juillet 1944.
La personnalité de Vreuls est attachante à plus d’un titre. D’un naturel foncièrement droit, il supportait mal la controverse et se hérissait volontiers devant les opinions qu’il jugeait entachées d’erreur. C’est ainsi qu’il fut surnommé le « Sanglier des Ardennes » par certains de ses détracteurs.
Son appartenance au mouvement de la jeune école française ne l’empêchait nullement de mettre en évidence les grands musiciens du passé. Ses maîtres de prédilection étaient : Beethoven, Wagner, Franck et Fauré, sans oublier son Maître vénéré, Vincent d’Indy. S’il se plaignait parfois, à juste titre d’ailleurs, du peu de place réservée aux œuvres belges dans les programmes des concerts, il ne manquait jamais de manifester sa gratitude lorsqu’on exécutait une de ses œuvres. Il admirait également Debussy. Cependant, l’impressionnisme musical ne l’attirait guère car il n’y voyait pas la solidité constructive dont les principes lui avaient été inculqués à la Schola et sans laquelle, disait-il, aucune œuvre musicale n’est viable (!). Vreuls était resté fidèle aux traditions les plus pures de l’école franckiste : ligne mélodique ample et développée, amour de la forme cyclique et des belles architectures sonores. Vreuls ne s’écartait que très peu des formes romantiques dans lesquelles il trouvait toute sa force expressive.
Violoniste et chef d’orchestre,Vreuls a affirmé sa maîtrise dans les genres les plus divers : l’opéra, le ballet, la symphonie, la musique de chambre, la pièce instrumentale et le lied. Les œuvres de musique de chambre occupent une place importante dans l’œuvre de Vreuls. D’une tenue sévère, elles témoignent de la générosité de son inspiration et d’un lyrisme qui l’apparentent directement à Franck et à Lekeu (avec qui il avait pris quelques leçons dans sa jeunesse). Et cela se sent beaucoup dans les deux sonates présentes dans cet enregistrement. La première sonate en si majeur date de 1900 et est dédiée à l’un des maîtres absolus du violon, Eugène Ysaye. La seconde, en sol majeur est plus tardive. Datée des années 1922/23 elle est dédiée à Mathieu Crickboom, un autre tout grand violoniste verviétois et principal disciple d’Ysaye.
Un compositeur de cette envergure méritait-il l’oubli presque complet dans lequel il est laissé actuellement ? On peut affirmer que non… et au vu de l’enthousiasme des critiques qui se sont penchés sur cet enregistrement (cliquez sur les liens ci-dessous pour lire leur avis), il est bien possible que d’autres œuvres soient exhumées à l’avenir, pour notre plus grand plaisir.
http://archives.lesoir.be/victor-vreuls_t-20110601-01F2Q9.html
http://www.lalibre.be/culture/musique/article/664370/victor-vreuls-diane-andersen-eliot-lawson.html
http://resmusica.com/2011/06/06/victor-vreuls-un-pilier-de-lecole-franco-belge/