Agneau mystique

Puisque nous ne quittions pas la Belgique (ou si peu) cet été pour les destinations ensoleillées, nous avons mis à profit ces quelques jours de congés complets à voyager au cœur même de nos régions en bravant parfois des conditions climatiques très défavorables. Ainsi deux jours en Zélande aux Pays-Bas, deux jours à la Côte d’Opale en France et de nombreuses excursions en Belgique, France, Hollande Allemagne et Luxembourg nous ont permis de reprendre un peu de souffle pour aborder cette nouvelle saison bien chargée. Et à faire le bilan de ces vacances, nous ressentons une impression de diversité, de richesse et de véritable beauté de nos régions avec de véritables grandes émotions devant des paysages somptueux ou du patrimoine artistique et urbanistiques hors du commun.

Et parmi ces émotions artistiques, la visite faite à la Cathédrale Saint-Bavon à Gand restera pour moi l’un des grands moments de cet été. Je ne me souvenais pas d’avoir vu de mes yeux et dans sa splendide réalité le fameux polyptique de l’Agneau mystique des frères van Eyck qui est précieusement conservé dans la Cathédrale. Bien souvent observé longuement dans de beaux livres d’art, j’avais déjà beaucoup lu sur ce sujet et sur ce gigantesque chef-d’œuvre et avais bien souvent commenté les volets consacrés aux célèbres Anges musiciens. Je voulais simplement le voir réellement… et la visite m’a véritablement bouleversé. Je serais resté des heures à méditer, regarder, rêver devant ce foisonnement exceptionnel d’épisodes bibliques, devant ces couleurs, ces personnages d’une inouïe variété… cette nature si précise et si formidablement rendue. Toutes les reproductions du monde ne procurent pas le dixième de l’émotion ressentie en présence de l’œuvre véritable.

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Gand, Cathédrale Saint-Bavon

 

Voici, pour ceux qui voudraient découvrir les sujets et l’histoire de l’Agneau mystique, un résumé bien concis (qui ne s’attache cependant qu’à décrire le polyptique dans sa position ouverte) mais pertinent proposé par Wikipédia :

« L’Agneau mystique est un polyptyque de l’adoration réalisé par les frères van Eyck et achevé en 1432 conservé dans la cathédrale Saint-Bavon de Gand (Belgique). Cette œuvre marque la naissance de la révolution artistique flamande, et constitue un véritable chef-d’œuvre de la peinture des primitifs flamands.

Commandé par Joost Vijdt, marguillier de l’église Saint-Jean de Gand (devenue depuis la cathédrale Saint-Bavon), le polyptyque est commencé par Hubert Van Eyck et terminé par Jan Van Eyck après la mort de son frère en 1426 et a été placé le 6 mai 1432 sur l’autel de la chapelle du commanditaire, dans l’église Saint-Jean.

Le polyptyque, sans compter les cadres, mesure 3,75 × 2,60 m (en position fermée) et 3,75 × 5,20 m (ouvert) et est constitué de dix panneaux de bois de chêne. Il possède un programme iconographique complexe, s’appuyant pour une grande part sur le texte de l’Apocalypse selon saint Jean l’Évangéliste. Il traite de deux sujets bibliques distincts, selon que le retable soit ouvert ou fermé.

 

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L’intérieur (ouvert) porte de gauche à droite :

    En quarts de lune supérieurs :
        Caïn et Abel
        Meurtre d’Abel par Caïn
    En partie haute :
        Adam
        Anges chanteurs
        Vierge Marie
        Dieu
        Saint Jean-Baptiste
        Anges musiciens
        Ève
    En partie basse :
        Juges intègres
        Chevaliers du Christ
        L’Agneau mystique et la Fontaine de la Vie (au centre l’Agneau mystique entouré de six scènes dans le sens des aiguilles d’une montre : 1- Saint Esprit et Jérusalem, 2- vierges, 3- figures du Nouveau Testament, 4- Fontaine de Vie, 5- Figures de l’Ancien Testament, 6- confesseurs)
        Ermites
        Pèlerins dont Saint Christophe

L’épanouissement de la peinture flamande débute selon plusieurs historiens de l’art avec ce chef-d’œuvre.

Les érudits ont longuement cherché à interpréter cette œuvre. Ils y ont cherché en particulier l’interprétation des textes extraits du livre de l’Apocalypse, de la légende des saints, du Bréviaire Romain, de la littérature religieuse de l’époque. L’examen de ces thèses, dont aucune ne permet de conclure que les explications les plus simples.

Dans les panneaux de cette œuvre, on distingue les arbres des régions nordiques de ceux des pays méridionaux. L’admirateur de l’œuvre peut s’amuser à contempler de minuscules personnages qui se promènent sur une route serpentant à travers rochers et prairies, à identifier les essences de ces arbres composant ce décors à identifier le détail de leur feuillage, à examiner la minutieuse précision des édifices, des maisons, des cabanes.

Sur le volet des Juges Intègres de cette œuvre, l’artiste donne de la consistance aux touffes du feuillage et indique leur place dans le paysage. C’est comme si le peintre nous donnait envie de palper du regard les objets, à évaluer leur volume, à prendre conscience de leur poids, comme de leur apparence.

En 1934, deux panneaux du retable furent volés par Arsène Goedertier, sacristain de l’église. L’un d’entre eux, saint Jean Baptiste fut restitué par le voleur, mais il mourut avant de dire ou se trouvait le second, « Les Juges intègres ». Il n’a jamais été retrouvé, mais une fidèle copie, réalisée par Jef Vanderveken d’après une copie de 1559 par Michiel Coxcie, le remplace. C’est le premier panneau, en bas à gauche, lorsque le polyptyque est en position ouverte.

La nudité des sujets des deux panneaux Adam et Ève ayant été jugée choquante, surtout dans une cathédrale, ceux-ci ont été vendus à l’État belge en 1861 et déposés aux Musées royaux des beaux-arts de Belgique à Bruxelles. Les Allemands ont enlevé les autres panneaux en 1917 et les ont transférés en Allemagne. Après la Première Guerre mondiale, le polyptyque fut à nouveau reconstitué dans son intégralité, mais Adam et Ève restent la propriété de l’État belge. »

Mais au-delà de cette description, rien ne saurait remplacer la visite à Saint-Bavon. Alors, si par hasard vous passez par Gand, n’hésitez pas, entrez dans la Cathédrale et allez ressentir le grand frisson artistique… C’est vraiment exceptionnel !

Un avis sur “Agneau mystique

  1. Les liégeois semblent avoir une affection spéciale pour cette oeuvre. Alexis Curvers, né dans le Laveu, un peu philologue, un peu écrivain (Tempo di Roma), compagnon de Marie Delcourt, a sans doute livré dans son analyse de ce tableau le meilleur de sa réflexion, aujourd’hui oubliée, et pas inutilement : certaines de ses prises de position « philosophiques » ne méritent pas d’être retenues.
    Durant ces vacances, j’ai éprouvé des sensations identiques devant un triptyque, le Jugement Dernier de Roger de la Pasture, exposé de façon exceptionnelle (salle obscure, climatisée, mise en valeur par spots froids…) aux Hospices de Beaune. On devrait pouvoir borner la visite à celle de cette salle, mais c’est difficile, la célébrité procurée par « La grande vadrouille » ayant rendu le monde entier familier de la grande salle (« Dites 33 – Thirty three… ») et les autres présentant peu d’intérêt à des esprits indifférents aux techniques et outils chirurgicaux, psychologiques et pharmaceutiques du XVIe siècle et suivants. Dommage que l’auteur soit présenté sous le nom de Rogier Van der Weyden… Mais soit : il va falloir s’habituer.
    Je veux souligner l’importance d’une phrase dans ta note : « Toutes les reproductions du monde ne procurent pas le dixième de l’émotion ressentie en présence de l’œuvre véritable. »
    C’est, comme toujours, très juste. Voyageons pour de vrai, au lieu de surfer.

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