Un jour… Un chef-d’oeuvre! (40)

Une histoire de famille à Amsterdam à la Renaissance et un joyau… liégeois!

40a.Gerrit Pietersz Sweelink, Sainte Cécile, 1593.

Gerrit Pieterszoon Sweelink (1556-1612), Sainte Cécile, 1593.

Gerrit Pietersz Sweelink, né le 1er novembre 1556 à Amsterdam et mort vers 1612 dans la même ville, était un peintre et dessinateur hollandais de l’Âge d’or néerlandais. Il était notamment actif entre 1590 et 1610. Il est le frère de l’organiste et compositeur Jan Pieterszoon Sweelinck, surnommé L’Orphée d’Amsterdam, de qui il a peint un portrait.

Pour le quarantième billet, je refuse la quarantaine… je vous propose d’écouter cinq versions d’un chef-d’oeuvre ainsi que cinq images transversales… Voici d’abord la version originale… par un musicien de chez nous sur un des joyaux de chez nous!

Jan Pieterszoon Sweelinck (1562-1621), Fantaisie chromatique SwWV 258 interprétée par Serge Schoonbroodt à l’Orgue renaissance de l’église Saint-Jacques à Liège.

L’orgue de l’église Saint-Jacques, dont le buffet splendide rayonne à travers ses polychromies, bleu et or, et dont les proportions s’intègrent harmonieusement à l’architecture du lieu, est l’oeuvre d’un facteur d’orgue inconnu. La date 1600 est inscrite en dessous du positif de dos et sur le grand corps. Il est cependant pensable qu’il s’agisse là d’une réalisation des facteurs Nicolas Niehoff ou Florent Hocquet qui ont tous deux travaillé à Liège à la même époque. La composition de l’orgue d’alors est inexistante.
C’est André Séverin, organier de Maastricht installé à Liège, qui transformera radicalement l’instrument en 1669 et qui, fier d’avoir travaillé sur cet orgue, demandera à être inhumé sous la tribune. Sur la plaque funéraire se trouve la citation: « André Séverin en son art sans pareil nous a fait ces orgues, l’un de ces merveilles. Reçut à Maastricht sa vie et son estre et mourut rempli de grâce dans ce cloître. Ainsi d’un destin très heureux, son corps repose dans ce lieu, son âme éclate dans les cieux et son ouvrage au milieu. » Nous ne savons rien de son travail sur l’instrument, tout au plus est-il possible de faire des suppositions quant à la composition.

Entre 1816 et 1829 sont entamées des réparations de l’orgue par Arnold Graindorge, dont les oeuvres les plus importantes se trouvent en l’église des Rédemptoristes en Hors Château à Liège et à la cathédrale de Malmédy. En 1834, il présente au Conseil de fabrique un projet de restauration de l’orgue, son devis témoignant de l’état de ruine de l’instrument. D’autres projets seront proposés, ceux de Joseph Merklin et Arnold Clerinx. C’est ce dernier qui sera choisi en 1854. Le nouvel orgue comprend 44 jeux sur trois claviers et pédalier. Les grands volets disparurent à ce moment.

Une autre restauration fut entreprise, en 1888, par Charles Anneessens de Grammont. Depuis, plusieurs projets se sont succédés sans aboutir. Les tuyaux de façade en étain ayant été volés pendant la seconde guerre mondiale, ils sont remplacés par des tuyaux en zinc.

En 1954, Pierre Froidebise est chargé de la restauration de l’orgue. En 1962, l’orgue est démonté en vue d’une restauration. Le travail est confié à la Maison Organa Van de Cauter de Châtelineau qui est dessaisie du dossier à la mort de Pierre Froidebise qui survint plus tard en 1962. Le professeur Hans Klotz de Cologne est choisi comme nouvel auteur du projet et l’adjudication est faite en faveur du facteur d’orgue Stephan Schumacher. La Commission Consultative des Orgue qui comprend des personnalités du monde de l’orgue décide, en 1971, de retirer le projet au professeur Klotz.

En 1986, Hubert Schoonbroodt, professeur au Conservatoire Royal de Musique de Bruxelles, est désigné par le Conseil de fabrique pour être le nouvel expert. Hélas, il décédera accidentellement en 1992, avant le début des travaux. C’est alors qu’est nommé Pierre Thimus, organiste titulaire, comme surveillant des travaux. Son travail se fera en collaboration avec Koos Van de Linde, technicien conseil hollandais et expert de la facture des orgues de la renaissance. C’est le facteur d’orgue Guido SCHUMACHER qui effectuera ces travaux entre 1993 et 1998.

Cet instrument est le seul qui nous fasse entendre ces sonorités inhabituelles et qui permette ainsi de rendre justice à l’oeuvre de Sweelinck et de Cornet. Les Pays-Bas ne disposent pas d’instrument du XVIe siècle intégralement conservé, même si on y trouve des instruments dont les parties originales subsistent dans des constructions plus tardives. La richesse des timbres des jeux d’anches et des flûtes, principale caractéristique de l’orgue Niehoff, nous offre une grande variété de couleurs qui nourissent notre imaginaire, déjà largement comblé par le spectacle visuel dans cette magnifique église.

Les prédécesseurs de Niehoff avaient conçu un orgue qui comportait un Hauptwerk avec un plenum de « principaux » (sous forme de Blockwerk) et un Positif composé de jeux individuels, construit comme Rückpositiv ou Oberwerk.

L’empreinte Niehoff, qui fut alors considérée comme une véritable révolution esthétique, consista dans le rajout de ces fameux jeux d’anches et de flûtes postés sur un sommier propre en hauteur et relié au Hautpwerk. Ce sommier reçut alors son propre clavier, qui devint celui des solos. Orgues en France et dans le monde.

40c. Orgue de Saint-Jacques

Jan Pieterszoon Sweelinck (1562-1621), Fantaisie chromatique SwWV 258 interprétée par Ton Koopman au clavecin.

Si, poussant la porte d’un de ces intérieurs flamands nés du pinceau lumineux de Vermeer, vous surprenez dans la quiétude feutrée de la clarté du matin une jeune fille au virginal, malgré votre silence respectueux, la musique née dans cet instant restera voilée de mystère. Et si, des jeunes mains, s’envolaient quelques notes d’un compositeur si célèbre dans les Pays-Bas du 17ème siècle qu’on le surnommait « Le Prince des Musiciens », « L’Orphée d’Amsterdam » ? […]

40d. Johannes Vermeer, Jeune femme jouant du virginal, 1670-72. L'un des derniers tableaux.

Johannes Vermeer (1632-1675), Jeune femme jouant du virginal, 1670-72. L’un de ses derniers tableaux.

Reprenant à 15 ans la charge d’organiste de son père à la Oude Kerk d’Amsterdam, où il sera inhumé, Jan Pieterszoon Sweelinck, ce sédentaire génial, qui n’a jamais quitté les Pays-Bas, est pourtant au carrefour de la musique de son temps. Il connaît les œuvres de Gabrieli, de Cabezon et des virginalistes anglais et sa réputation de compositeur, d’organiste et de pédagogue franchira les frontières ». Musique sacrée et profane,  mélange de rigueur et de fantaisie , l’art subtil de Sweelinck s’épanouit dans la souplesse et la clarté des lignes de constructions polyphoniques complexes, dans ces thèmes remis sans cesse sur le métier, « essorés le plus possible »,toujours rebrodés d’ornements précieux et tissés de cette même lumière intérieure qui vibre dans les tableaux de Vermeer.

Philippe Haller, Sous le charme de l’Orphée d’Amsterdam, 2014

40b. Portrait de Jan Pieterszoon Sweelinck par (1606)

Portrait de Jan Pieterszoon Sweelinck par son frère Gerrit Pieterszoon Sweelink (1606)

Gerrit Pieterszoon Sweelink, né le 1er novembre 1556 à Amsterdam et mort vers 1612 dans la même ville, était un peintre et dessinateur hollandais de l’Âge d’or néerlandais. Il était notamment actif entre 1590 et 1610. Il est le frère de l’organiste et compositeur Jan Pieterszoon Sweelinck, surnommé L’Orphée d’Amsterdam, de qui il a peint un portrait.

Jan Pieterszoon Sweelinck (1562-1621), Fantaisie chromatique SwWV 258 interprétée par
Xavi Torres au piano.

40c. Fantaisie de Jan Pieterszoon Sweelinck par (1606)

Jan Pieterszoon Sweelinck (1562-1621), Fantaisie chromatique SwWV 258 interprétée par le Quatuor à Cordes d’Utrecht

Jan Pieterszoon Sweelinck (1562-1621), Fantaisie chromatique SwWV 258 interprétée par l’Ensemble de flûtes renaissance Harmonia.