Les membranophones

 

Comme je vous l’avais signalé dans le précédent billet consacré aux instruments de musique (http://jmomusique.skynetblogs.be/post/7379434/percussions), les percussions se divisent en trois groupes, les membranophones, les idiophones et les cordophones. Commençons par les instruments à membrane dont quelques uns sont utilisés au sein de l’orchestre symphonique.


 

tambour-afrique
 


Il s’agit en fait de ce que nous appelons communément les tambours. Le nom provient du persan tambûr et désigne un instrument de musique constitué d’un fût sur lequel sont tendues une ou deux peaux qui sont frappées par les doigts ou des baguettes prévues à cet effet. La vibration de la peau est amplifiée par le fût qui est en fait une caisse de résonance. Le son produit par la percussion est parfois modifié par une pièce en acier, en boyau ou en nylon qu’on nomme le timbre (nous y reviendrons). 

Le terme tambour est donc un générique dont les nombreuses variantes portent des noms différents. Ils existent dans toutes les cultures et les premières traces archéologiques de ce type d’instrument remontent à environ 6000 ans avant notre ère. C’est le genre de fût utilisé qui permet de distinguer les différentes variantes de tambours. On les nomme alors en fonction de leur forme (tonneau, sablier, calice, …). La peau de chèvre, de vache d’agneau ou de matière synthétique est fixée sur le fût au moyen de clous, de colle, de boutons, de pinces ou d’un laçage. Les tambours d’orchestre sont munis de deux colliers autours desquels sont enroulés les bords de la peau. Serrés l’un contre l’autre, les deux colliers maintiennent la membrane tendue. Mais dans les tambours modernes des vis de tension sont fixées au collier supérieur permettant de tendre ou de détendre la peau pour l’accorder.TAMBOUR
 


 


Mais on distingue également les tambours par leur jeu et leur fonction. Presque partout, les tambours sont utilisés dans des fonctions officielles liées à la société, à l’armée ou à la religion. On oublie souvent qu’il possède aussi une fonction importante dans la communication entre les êtres humains éloignés les uns des autres. Les rythmes aux fonctions sémantiques codées permettaient de signaler l’arrivée d’ennemis, de gibier et à transmettre des informations instantanées. Les roulements de caisse claire servaient autrefois à communiquer certaines instructions aux régiments d’infanterie, mais c’est aussi au son du tambour que l’on faisait les « annonces » dans les rues et sur les places. Tout naturellement, ces instruments se sont intégrés dans les musiques de toutes sortes et on trouvé place au sein des grands orchestres.


 

timbales
 

 Timbales


Les tambours les plus utilisés dans nos orchestres sont les timbales. Leur fût est reconnaissable par le cuivre qui leur donne cette couleur originale. Ces grosses marmites sont tendues d’une peau que le percussionniste, nommé dans ce cas le timbalier, frappe avec des baguettes spéciales. Sa caractéristique principale réside dans la possibilité d’accorder précisément la tension de la peau pour produire la note attendue. Certaines timbales sont munies d’une pédale qui tend et détend la peau et modifie le son produit. Certaines timbales chromatiques permettent, par l’usage d’une pédale, de tendre et de détendre la peau rapidement et de provoquer des effets de glissando. Bartok en a fait un usage original dans sa Musique pour cordes percussions et célesta. En fonction de la note désirée, il existe donc des timbales de grandeur différentes. C’est en fait le diamètre de la peau qui varie d’un instrument à l’autre. Le timbalier, disposant de plusieurs timbales de diamètre différent, peut passer rapidement de l’une à l’autre et préparer les futures notes en réglant les pédales et les clés d’accordage. 


Timbale ancienne en bois

Timbale ancienne en bois


Le mot timbale vient du latin « tympanum » qui désignait un tambour phrygien en usage les mystères religieux de Cybèle (Source : Wikipedia). Leur son plus grave et plus profond que celui des tambours habituels et les différents timbres obtenus par le choix des baguettes permet une vaste gamme de nuances. Les baguettes, justement, sont en bois tandis que leur extrémité est recouverte de feutre,
de flanelle, de bois, de liège, d’éponge ou d’autres matériaux encore. Chaque variante trouve une utilisation selon le contexte musical et l’indication du compositeur dans la partition. Il arrive fréquemment que le timbalier change de baguette durant l’œuvre. Mais le timbalier peut encore assourdir le son en plaçant du tissu sur la peau, il peut aussi arrêter la vibration pour produire une note courte et nette en plaçant sa main sur la peau. Mais le plus impressionnant reste le roulement de timbales qui permet, pas la succession très rapide des chocs de donner l’impression d’une longue note continue.
 


 


La partition de la timbale est écrite en clé de fa, sur une portée normale. Les timbales produisent en effet des notes précises qui sont notées comme un autre instrument de l’orchestre. Mais la plupart des percussions ne possèdent qu’une écriture rythmique notée sur une portée d’une seule ligne. Dans la musique de l’époque classique, deux timbales suffisent et leur rôle est de renforcer le son dans les fortissimo d’orchestre. Elles sont donc accordées sur la tonique et sur la dominante.


 caisse claire

 


Autre instrument fort présent dans nos orchestres, la caisse claire. Elle est une évolution du tambour militaire et est encore parfois nommée ainsi. Elle fait son entrée dans le répertoire symphonique grâce à des compositeurs comme Mahler, Ravel et Chostakovitch. Dans les opéras et les symphonies, sa sonorité reste liée à la rhétorique militaire. Les traits les plus connus sont, bien sûr, l’ostinato du boléro de Ravel, celui de Shéhérazade de Rimski-Korsakov ou encore dans l’épisode de « l’invasion » dans la septième symphonie « Leningrad » de Chostakovitch. La caisse claire est utilisée dans tous les styles musicaux et est un élément déterminant de la batterie de rock, de jazz, de reggae ou de variété.


 


 

Elle est composée d’un fût cylindrique et de deux peaux. L’une destinée à être frappée, l’autre à vibrer par résonance. Le fût est souvent en métal (aluminium, acier ou alliages divers), plus rarement en bois. Les peaux sont d’origine animales, mais sont de plus en plus fabriquées en matières synthétiques. Le son sec qu’elle produit est lié aux baguettes très rigides et fines utilisées ainsi qu’à ce que l’on nomme le timbre qui est une sorte de petit rideau de fer placé sous la caisse claire et attaché à la peau inférieure. Il vibre avec elle en lui donnant un son clair et aigre. Il peut, évidemment, être désactivé par une manette qui l’éloigne de la peau vibrante. Dans l’orchestre, la caisse claire est posée sur un pied, mais dans les fanfares, elle est portée par le musicien et tenue au corps par une sangle. 

Comme la caisse claire, la grosse caisse est l’un des éléments principaux de la batterie. Dans les fanfares et les orchestres, elle est utilisée de manière indépendante depuis l’époque baroque. Son origine semble remonter à la haute antiquité. Elle comporte la même structure que la caisse claire, mais en beaucoup plus grand (fût cylindrique, deux peaux, timbre, …). Elle se joue avec une mailloche nommée très poétiquement la Cigogne. Dans les batteries, elle est actionnée par une pédale enfoncée par le pied.


 

Grosse caisse, Sumer, XXII siècles ACN

Grosse caisse antique (Sumer, XXII siècles ACN)


Elle est l’instrument le plus grave des tambours et peut développer un volume sonore très important. On en trouve des applications dans toutes les symphonies de la fin du XIXème siècle et dans la musique orchestrale du XXème. Elle peut simplement colorer certaines orchestrations ou constituer l’un des éléments terrifiants des déflagrations sonores.


 

Grosses-caisses-SSB-HD


Dernier instrument de la famille des membranophones à être présent de manière très fréquente dans nos orchestres symphoniques, le tambourin est très populaire et universel. Il est constitué d’un court cylindre en bois qui sert de petite caisse de résonance et de manche. D’un diamètre variant d’une vingtaine à une cinquantaine de centimètres, il possède une membrane (animale ou non) tendue qui sert de surface à percuter.


 

Tambourins


La technique du tambourin varie énormément selon les civilisations, mais la manière la plus répandue d’en jouer est de tenir le tambourin dans une main tandis que l’autre frappe la membrane. Les sons sont variés en fonction de l’endroit de la peau que l’on frappe (c’est d’ailleurs le cas pour tous les tambours). Il sera plus ou moins sourd quand on se rapprochera de son centre. Il se joue la plupart du temps à mains nues, mais il arrive que pour produire un effet spécial, le compositeur demande l’usage de baguettes. Certaines variantes, comme dans le tambourin irlandais, exigent de jouer avec les deux extrémités d’une même baguette. 



 

Mais le fût du tambourin est souvent muni des cymbalettes (idiophones) qui se mettent à sonner à chaque percussion de la peau. On les utilise aussi seules en secouant le tambourin, mais dans cet usage, l’instrument n’est plus membranophone mais idiophone … et cela, c’est le sujet d’un prochain billet !