Magnifique soirée hier soir à la Salle Philharmonique avec le requiem de Brahms et le récital de Sara Mingardo. J’y reviendrai plus en détail demain.
Comme tous les mélomanes belges, le Concours Musical Reine Elisabeth de Belgique ne me laisse pas indifférent. Bien que je mesure toute la subjectivité du jugement que nous pouvons avoir d’un interprète et la relative importance des concours dans la vie musicale des auditeurs, je ne peux m’empêcher ce matin de vous faire part de ma déception et de mon inquiétude.
La session chant 2008 qui vient de s’achever par la remise des prix tôt ce matin a sans doute plongé plus d’un mélomane dans le doute et l’incompréhension. Volontairement, je ne citerai aucun nom pour ne blesser personne, mais de nombreuses interrogations m’assaillent. Quels sont les critères réels d’un jury. La direction du concours vante sa diversité en plébiscitant les différentes spécialités de ses membres (directeurs de maisons d’opéras, chanteurs, pédagogues, chefs d’orchestre, …). Comment se fait-il, alors que les styles des différentes époques musicales soient à ce point incompris ? Comment peut-on mettre en avant des personnalités qui passent clairement à côté des textes qu’ils chantent ? Comment encore admettre ces ratés flagrants dans le choix des répertoires et pourtant cautionnés ? Je ne le sais pas.
Je crois fondamentalement que le jury est avant tout celui de l’opéra, comme si le chant n’existait que par le bel canto. Non et non, le chant, c’est aussi l’oratorio, le lied et la mélodie ainsi que la musique religieuse. Il semble que ceux qui ont choisi le lied soient pénalisés. Il me semble aussi que le chant, c’est le texte et sa diction. Je n’ai pas entendu chanter en français compréhensible. Je sais que la langue est difficile, mais si on choisi le français, il faut qu’on le comprenne. Chanter dans cinq langues, c’est bien, mais si on ne les comprend pas, où en est l’utilité ?
La culture musicale me semble aussi importante. Elle consiste, je l’ai souvent dit, en une e juste appréciation des circonstances d’une œuvre. Il est inadmissible de récompenser une interprétation opératique et bel cantiste d’un des Quatre Derniers lieder de R. Strauss, œuvre crépusculaire et tendre s’il en est… (Zut, on peut déduire de qui il s’agit !).
Je crois qu’avec de tels principes, le chant est en danger. Si tout ce que la voix émet se résume à la colorature, à une puissance extrême dût-elle être criée, peu importe alors le message de l’œuvre. Nous n’en sommes plus là aujourd’hui et le palmarès me semble sorti tout droit des années soixante, au plus fort des divas narcissiques et de la virtuosité vide de sens. Il est grand temps de se ressaisir…et de refaire des chanteurs des musiciens plus que des acrobates qui promettent… ! Il faudrait peut-être revoir encore une fois la composition du jury et y intégrer aussi de véritables spécialistes du lied, de la musique baroque et de l’oratorio. Ce ne sont pas les directeurs d’opéras et les divas qui peuvent en juger. Mais alors, ultime question, que font les professeurs pour cautionner de telles erreurs de répertoire et de jugement musical. Sont-ils, eux aussi aveuglés par le narcissisme de la virtuosité à tout prix et le tape à l’œil sonore ?
Quand le choix du public ne correspond nullement à celui du jury (Prix Jacques Steeman), qui se trompe, la masse des auditeurs passionnés et émus ou les quelques membres d’un jury de professionnels… ?
C’était mon coup de gueule trimestriel… !