En 1914, la compagnie des chemins de fer français avait passé commande de vingt-deux wagons restaurants. En 1918, trois d’entre eux furent affectés au train d’état major du maréchal Foch, qui fit aménager le 2419D en salle de réunion après avoir fait supprimer les cloisons. Les larges vitres flanquées de porte-bagages métalliques éclairaient la longue table où le destin de millions d’hommes serait scellé par deux fois.
C’est en effet dans ce wagon que fut signé l’armistice du 11 novembre 1918 mettant un terme à la première guerre mondiale après des négociations de quatre jours dans la clairière de Rethondes près de Compiègne. Les délégations allemandes et alliées stationnèrent quelques mois à Spa, dans nos Ardennes belges pour préparer les termes du traité résultant de la signature de l’armistice.
Les négociations définitives se feront à Trèves. Le wagon fut utilisé plusieurs fois pour faire la route entre Luxembourg, devenu le quartier général des alliés et Trèves qui accueille la rédaction définitive du traité entre décembre 1918 et février 1919.
Après 1918, le wagon fut amené aux Invalides et les Parisiens purent le visiter avec le respect dû aux lieux chargés de mémoire. Les années passèrent, l’émotion retomba et les intempéries eurent tôt fait de mettre à mal le vieux wagon.
C’est en 1927 qu’un américain obtint du gouvernement français l’autorisation de le remettre en état et de l’exposer dans la clairière de Rethondes qu’il n’aurait jamais dû quitter.
Transformé en musée, il ressortit de l’oubli lorsque, le 22 juin 1940, Hitler exigea de faire signer la demande d’armistice à l’endroit même où, vingt deux ans plus tôt, son pays avait été humilié. Une fois le France vaincue, Hitler ordonna de transférer le 2419D en Allemagne et, cette fois, ce furent les Berlinois qui, pendant une semaine, purent le visiter.
En 1944, à l’heure où le Reich vacillait, les SS le firent détruire pour qu’il ne retrouvât jamais la clairière française.
Celui qui est aujourd’hui exposé à Rethondes est une réplique, trouvée en Roumanie et restaurée, du véhicule le plus fameux des chemins de fer.
(D’après Daniel Appriou, Petites histoires de l’histoire, Paris, Acropole, 2008.)