Non, je ne vous parle pas des conditions climatiques humides qui s’abattent sur la Belgique ces derniers jours, l’automne, dans les pays à climat tempéré, c’est cela … et ce n’est pas la meilleure des saisons ! Au moment où le sommet de Copenhague vient de reconnaître les dangers de la pollution pour les modifications climatiques et le réchauffement de la planète (on a hâte d’entendre les décisions qui y seront bientôt prises, en espérant qu’il y en ait!), de gros titres de journaux relayent une découverte sensationnelle : la mer Méditerranée se serait remplie en deux ans !
Je ne suis pas un scientifique et donc je ne peux pas juger de la véracité de telles affirmations. Si elles sont sensationnelles et donnent froid dans le dos quant à la violence du phénomène, on ne peut cependant qu’être subjugué par l’image cataclysmique que représente pour nous un tel phénomène naturel.
Il y a 5,33 millions d’années, les eaux de l’océan Atlantique ont franchi le Détroit de Gibraltar avec une force exceptionnelle équivalente à plus de mille fois le débit du fleuve Amazone ! Il faut savoir qu’auparavant, l’espace méditerranéen était séparé de l’Océan par l’Isthme de Gibraltar et était une mer complètement fermée. Elle semble s’être évaporée en laissant un lac salé de modestes dimensions et mettant à jour des terres très en-deça du niveau de la mer.
Vue de la jonction entre l’Océan Atlantique et la Mer Méditérranée par le Détroit de Gibraltar
Le remplissage eut lieu de manière abrupte, sans doute à cause de la rupture de l’isthme de Gibraltar reliant le continent africain à l’Europe. Les scientifiques estiment alors que 90% de l’eau de la Méditerranée ont été transférés de l’Atlantique en l’espace de quelques mois et de deux ans maximum ! Ils ont calculé que les volumes d’eau engloutis sont énormes et correspondent à une montée du niveau de la mer de plus de dix mètres par jour ! La vitesse d’écoulement, malgré une pente assez faible a du atteindre les 300 km/h.
Les scientifiques en sont arrivés à cette conclusion en travaillant avec des nouvelles techniques qui permettent l’étude des strates de sédiments, la biostratigraphie et la manétostratigraphie. Ces découvertes remettent en cause la théorie précédente qui affirmait de manière très imprécise que le remplissage avait duré entre une dizaine d’années et quelques millénaires. C’est donc, semble t-il, une avancée remarquable dans la perception que nous avons de la formation de nos espaces géographiques.
Reconstitution de l’espace méditéranéen avant l’effondrement de l’isthme de Gibraltar avant qu’il ne devienne le détroit de 12 km que nous connaissons aujourd’hui.
Deux choses me frappent le plus. D’abord, c’est le peu de connaissances que nous avons en ce qui concerne le passé lointain de notre terre. De grands mystères subsistent dans les domaines du climat, de la tectonique des plaques, de la dérive des continents et dans leur formation très étrange. Chaque découverte vient illustrer un peu mieux des processus violents que la nature produit. Ces sciences, essentielles pour comprendre notre planète doivent encore se développer et les décideurs politiques doivent y mettre les moyens, c’est essentiel. Mieucx connaître le passé pour préparer l’avenir… aurons-nous le temps ?
Ensuite, on imagine à quel point, dans notre monde actuel, de tels cataclysmes pourraient être meurtriers et dévastateurs s’ils se produisaient en terres occupées par l’homme. Si les terres de la Méditerranée constituaient une fosse originelle et donc qu’une certaine profondeur pouvait se remplir d’eau ce qui n’est pas le cas de la plupart de nos terres habitées, on imagine mal ce que serait l’élévation substantielle du niveau de nos mers. De nombreuses contrées seraient ravagées par l’eau. Quand on parle de l’élévation de quelques mètres du niveau des océans suite à la fonte de la calotte glaciaire causée par notre pollution, on ne peut que redouter de tels événements. C’est justement pourquoi il faut agir au plus vite. Mais peut-on renverser la vapeur ? Les enjeux sont si énormes et les défis si titanesques !