« L’esprit n’est pas un récipient à remplir mais du bois à enflammer d’un feu qui lui inspire l’élan de la recherche et l’amour de la vérité ». Plutarque, L’Ami véritable.
La sagesse antique si souvent évoquée mais peu appliquée de nos jours avait le mérite de formuler en peu de mots les valeurs essentielles de la culture. Aujourd’hui, on se demande si on ne rencontre pas plus de têtes bien pleines que de têtes bien faites.
Plutarque (50-125 PCN)
L’important n’est pas de savoir tout ; personne ne peut accumuler toute les données et l’érudition que le monde moderne nous propose. Afin de compenser les failles inévitables de notre savoir, il est utile de sentir, de percevoir, bref de vivre de l’expérience que nous procurent tous les moments de la vie. Faire la liaison entre les faits observés et leurs conséquences, c’est avant tout ressentir.
De cette constatation quotidienne résulte la nécessité de construire dans notre esprit des structures efficaces et non figées. Ces dernières nous aideront à assimiler rapidement les nouvelles données et à en mesurer leur importance objective. Mais l’objectivité n’est pas non plus source de tout savoir. Il faut la dépasser pour vibrer, pour que l’expérience se transforme en un vécu signifiant et émouvant.
En d’autres termes, il est inutile de connaître, par exemple, toutes les symphonies de Beethoven dans le détail de leur plan, de leur date et de leur orchestration si on ne relie pas cette connaissance au vécu de l’homme et à ses implications émotionnelles. Les formes que prennent les faits ne sont pas le résultat du hasard, mais l’aboutissement d’un processus créateur révélateur d’une transformation émotionnelle. Il sera plus aisé pour tous de constater qu’une évolution psychologique entraîne forcément une évolution des structures du langage.
La question que nous devons nous poser à chaque instant de notre vie ne porte pas d’abord sur le comment, mais sur le pourquoi. Seulement ensuite, le comment viendra confirmer ou infirmer l’évolution constatée. Rien ne remplace l’expérience (c’est-à-dire le vécu). Méfions-nous cependant de l’enthousiasme débridé et superficiel. Cherchons à garder un esprit critique salvateur qui seul peut nous faire parvenir au ressenti en profondeur. Gardons-nous de tirer des conclusions hâtives C’est là seulement qu’on pourra véritablement parler de l’esprit et du bois qui s’enflamme énoncé par Plutarque. N’est-ce pas là que se trouve la vraie culture ?