Dans les années 1950, au Ghana, Samuel Kane Kwei apprend le métier de menuisier lorsqu’un de ses oncles, pêcheur réputé, lui demande de confectionner un cercueil particulier pour l’accompagner dans l’au-delà. Il s’exécute et crée un cercueil en forme de baleine.
Depuis, Samuel Kane Kwei a fait des disciples. Des menuisiers du Ghana fabriquent désormais des cercueils qui reflètent aspect de la vie du défunt. Pour un pêcheur, on fait un cercueil pirogue, poisson ou crustacé. Pour un agriculteur, c’est un cercueil ananas, épis de maïs, tomate, oignon, cacaoyer.
Certains chrétiens, eux, sont enterrés dans un cercueil en forme d’église ou de bible. Mais il existe aussi des cercueils chaussure, animal ou encore bouteille. Ils peuvent également évoquer un rêve non exaucé, comme la possession d’un véhicule de grand luxe. Ainsi certains représentent-ils un avion, une voiture, un camion ou un bateau.
Cercueil en forme de voiture de luxe
Avec les années, le volume du cercueil symbolise de plus en plus l’amour dont jouissait le défunt, de même que sa richesse et sa réussite. Le concept semble pourtant aller à l’encontre des valeurs des habitants qui n’accordent en fait que peu d’importance aux biens matériels. Certains cercueils sont construits dans un bois de mauvaise qualité, appelé wawa, qui est aussi le moins cher. Ce matériau, qui est peu résistant aux termites, ne résiste pas au temps. Il présente cependant quelques avantages car son poids léger permet un transport aisé du corps en musique accompagnées de danses, sur la tête ou sur les épaules. Ce bois est aussi tendre ce qui permet aux sculpteurs de ces œuvres particulières de les modeler plus facilement et de manière audacieuse.
Samuel Kane Kwei dans son atelier
Mais le plus surprenant, c’est qu’on trouve également des cercueils en forme de téléphone portable, de souris d’ordinateur ou … de lance-roquettes ! Samuel Kane Kwei, décédé en 1992 et Paa Joe, ancien disciple du créateur, ont marqué le siècle dernier, faisant du cercueil un objet attachant et artistique, sorte de « design » de la mort. Très rapidement, des « pièces » sont exposées en Europe et aux Etats-Unis, mais la fabrication artisanale reste cantonnée près d’Accra, la capitale ghanéenne et le métier est transmis de génération en génération par la prise en charge des plus jeunes par les designers chevronnés.
Cercueil en forme de téléphone portable
Le prix de ces bières toutes particulières et individualisées dépasserait de loin les mille euros, mais le prix n’est pas un obstacle pour beaucoup même si une telle somme représente une fortune pour les habitants de ce pays pauvre. Car comme dans d’autres pays d’Afrique et du monde d’ailleurs, le dernier voyage doit être grandiose. Si la vie n’a pas de prix, la mort en a bien un!
Au sujet de l’inventeur des cercueils design : il s’appelait Seth Kane Kwei, pas Samuel. Samuel est en fait son fils aîné, pasteur de son état, qui n’a pratiquement jamais travaillé sur un cercueil. Il s’est fait passer pour le patron de l’entreprise dans les années 90 afin de toucher l’argent d’une grosse commande. Depuis, son nom est resté attaché à cet art… C’est son frère Cedi qui avait effectivement réalisé ces cercueils. Depuis cinq ans le fils de Cedi – donc petit fils de Kane Kwei – qui s’appelle Eric Adjetey Anang a pris en main l’atelier.
Il était d’ailleurs l’été dernier en Belgique :
http://www.nieuwsblad.be/article/detail.aspx?articleid=152E34LE
Eric a été cité dans un article de Jean Christophe Servant dans le Monde Diplomatique en novembre dernier :
http://blog.mondediplo.net/2009-10-30-Cette-annee-la-bonne-gouvernance-n-a-pas-de-prix#Fiers-d-etre-ghaneens
Au cas où vous souhaitiez contacter Eric (en anglais…) : eric.kanekweiworks@gmail.com