Et puisque nous approchons à grands pas des fêtes de fin d’année, c’est l’occasion de revenir sur les retombées d’un anniversaire, celui des 111 ans de la célèbre étiquette jaune, la fameuse Deutsche Grammophon.
Jean-Pierre Rousseau vous en avait déjà parlé sur son blog discographique : http://bestofclassic.skynetblogs.be/archive-week/2009-44 en vantant les mérites du somptueux coffret de dvd’s. C’est à mon tour, maintenant de vous recommander ces publications.
On est en droit de se demander ce qui a bien piqué les dirigeants de DGG à fêter 111 ans ! Après tout, le centenaire aurait pu se suffire à lui-même et les publications en coffrets à prix doux sont légions ces derniers temps. Mais les professionnels du marketing ont réponse à tout. L’idée première, nous affirme Michael Lang, le président actuel de DGG, était de fêter les 110 ans. Mais cet anniversaire coïncidait avec le centenaire du porte parole le plus connu du catalogue, Herbert von Karajan. Afin de ne pas faire d’amalgame entre le maestro et la firme, ce que pourtant beaucoup de mélomanes font encore, il a décidé de fêter les deux séparément. Karajan en 2008 et DGG en 2009. C’est, évidemment, l’occasion de remettre en lumière un catalogue qui ne pourrait certes pas se passer de Karajan, mais qui comporte presque tous les grands artistes qui ont marqué la vie musicale du XXème siècle et de la première décennie du XXIème. C’est en conséquence un logo « 111 » qui orne les publications festives.
Il faut avouer que la marque jaune est connue dans le monde comme le symbole (presque un archétype) de la musique dite classique. Beaucoup pensent encore aujourd’hui que le sigle, signature en noir italique insérée dans une sorte de fronton architectural (cartouche) et surmonté d’un bouquet de tulipes, le tout sur fond jaune est garant de qualité et de travail soigné. S’il n’y a aucune firme de disque qui soit à l’abri d’un « raté », DGG comporte, de fait, des produits qui sont (presque) toujours très soignés, bien documentés, traduits en plusieurs langues et élégants dans leur classicisme.
L’entreprise a été fondée en 1898 par les trois frères Berliner (Emil, Joseph et Manfred) sous le nom de Deutsche Grammophon Gesellschaft. Le premier sigle n’était pas celui qu’on connaît aujourd’hui, mais le fameux chien (fox terrier) devant le phonographe écoutant « la voix de son maître ». Ce dernier est devenu l’emblème tout aussi prestigieux d’EMI lorsqu’en 1916, la branche allemande s’est séparée de l’anglaise provoquant la naissance d’EMI).
Impossible de citer ici tous les enregistrements et les interprètes de référence qui figurent sur le label jaune, mais citons en vrac Karajan, Furtwängler, Bernstein, Kleiber, Abbado, Kubelik, Jochum, Boulez, Thieleman ou Salonen pour les chefs d’orchestre, Kempff, Richter, Gilels, Pollini, Pirès, Grimaud pour les pianistes, Oistrakh, Milstein, Mutter, Hahn, Repin, pour les chanteurs, Wunderlich, Fischer Dieskau, Streich, Janowitz, Domingo, Alagna, Villazon, Kozena, von Otter, Netrebko, … et ce ne sont que ceux qui me passent par la tête en ce moment ! C’est dire la richesse du répertoire de DGG. Car les producteurs ont voulu toucher à tous les domaines, que ce soient les traditionnels compositeurs classiques et romantiques, la musique ancienne avec le label Archiv reprenant les grands noms des baroqueux ou la musique contemporaine en ouvrant largement le label aux compositeurs comme Ligeti, Henze, Nono, Berio, Eötvös et plein d’autres. Il semble que d’autres ouvertures plus « cross-over » soient possibles avec les contrats signés avec Sting. Oui, décidément, DGG reste un des piliers des discothèques, des rayonnages des magasins et des collections particulières. Un rapide coup d’œil sur la mienne met en évidence la couleur jaune qui semble dominer (de peu, mais tout de même celle d’EMI en rouge).
Parmi les parutions commémoratives, un gros coffret (55 cd’s) reprend, de manière forcément subjective les enregistrements essentiels de DGG. Un plus petit (6 cd’s) offre une compilation des gran
ds moments de la DGG, mais aussi un vaste panorama des « incontournables » du répertoire, ce qui me permet de le conseiller vivement à ceux qui cherchent à se familiariser avec le répertoire et découvrir à prix doux, toute l’ampleur de la musique. Ensuite, un coffret de DVD (je vous invite à en lire le détail sur le site de JPR à l’adresse ci-dessus) montre que l’enregistrement vidéo et aujourd’hui DVD et Blue-Ray fait vraiment partie depuis longtemps de la politique maison (le label UNITEL y est pour beaucoup !). Ajoutez à cela une politique Internet qui permet désormais le téléchargement et des sorties uniquement sur le Web destinées à séduire aussi bien le jeune public friand de la pratique du téléchargement (encore bien cher cependant) que les moins jeunes de plus en plus informatisés.
Et pour couronner le tout, vient de paraître un ouvrage en français relatant toute l’histoire de DGG se proposant de vous montrer sa vision de la musique. Richement illustré de photos des artistes et des légendaires pochettes de disques, le livre contient une mine incroyablement riche d’anecdotes, de commentaires des interprètes fiers, qui l’eut cru, de figurer en bonne place au sein de la marque prestigieuse.
Les interview des ingénieurs du son, qui jouent un rôle plus qu’essentiel dans la réussite d’un enregistrement, tentent d’expliquer, certes avec un léger ton de propagande, la politique de production et de réalisation. Quand on demande à Heinz Wildhagen s’il existe un son propre à Deutsche Grammophon, il explique : « On ne peut pas véritablement l’affirmer. En fait, j’ai toujours essayé de restituer la spécificité acoustique de chaque orchestre. Si l’ensemble était enregistré dans la salle habituelle, j’essayais de mettre en valeur ses particularités dans l’enregistrement. Je n’ai jamais compris pourquoi on attend le même son de tous les orchestres. Si c’était le cas, pourquoi travailler avec différentes formations ? De la même manière qu’un soliste se distingue par sa voix, un orchestre doit avoir sa signature sonore. Il faut naturellement se rappeler que la dynamique à cette époque (entre 1951 et 1983) était limité à 40 dB. Les lois de la physique sont telles que la dynamique de la musique est réduite dans les salles offrant une certaine réverbération. De ce fait, les enregistrement étaient souvent réalisés dans les églises, parce que cela réduisait le besoin de compression au mixage. Bien entendu, la qualité d’un enregistrement dépend en permanence de l’équipement utilisé et du talent de l’équipe d’enregistrement » (à la page 192 de l’ouvrage). Sur la couleur des orchestres et l’individualité des prises de sons, on lui donne entièrement raison. Parfois cependant, on peut regretter que de remarquables pianistes soient pourtant desservis par des prises de son étranges, trop réverbérées. Je pense, en particulier aux Nocturnes de Chopin enregistrés par Maria Joao Pirès !
Un seul raté, à mon sens, c’est que ce livre qui comporte 223 pages aurait pu symboliquement en compter 222 (2X111) ! Certains regretteront sans doute aussi l’absence d’enregistrement qui leur sont chers, mais n’est-ce pas aussi là une question de choix personnels ?
Avec ces quatre « produits », séparés ou rassemblés, vous tenez là d’excellentes idées pour les cadeaux que vous ferez bientôt à vos proches ou à vous-mêmes. Il y en a pour tous les goûts que vous soyez mélomanes débutants, avertis, férus de films ou passionnés d’Histoire, la Deutsche Grammophon a, bien sur, pensé à vous !