Trombones

 

 

J’ai toujours été très impressionné par la sonorité pleine et ample des trombones au sein du grand orchestre. Leur aspect solennel, la dignité de leur tenue et leur volume sonore incomparable lui donnent une rôle tout particulier que les compositeurs sauront utiliser dans tous les types de musiques.

 

C’est l’instrument de l’orchestre qui sonne le plus fort. Ainsi, certains chefs d’orchestre s’amusent à les dénigrer gentiment. Il m’est arrivé une fois d’assister à la première répétition d’une grande symphonie lors de la première lecture du lundi matin. Le chef invité, en montant pour la première fois sur l’estrade a levé les mains pour donner le signal du départ et avant qu’un seul son ne soit émis par quelque instrument, s’est arrêté et a crié : « moins fort, les trombones ! ». Car si on n’y prend garde, la section des trombones pourrait sans difficulté couvrir le reste de l’orchestre symphonique!

 

Instrument de la famille des cuivres clairs, les trombones ont de lointaines origines dans le buccin, sorte de tuba joué par les antiques romains. Le terme « buccin » fut d’ailleurs repris au XIXème siècle dans la musique militaire pour désigner un trombone dont le pavillon représentait une tête de serpent. C’est sans doute vers le XIIIème siècle qu’on eut l’idée d’ajouter deux tubes coulissants l’un dans l’autre à une trompette de registre grave. La coulisse était née. L’instrument fut alors nommé sacqueboute. Le mot est formé de deux termes aujourd’hui désuets : « sacquer » qui signifie tirer vers soi et « bouter » qui veut dire pousser dans le sens opposé. Si les principes des sacqueboutes étaient identiques au trombone, leurs dimensions étaient plus petites.


 


 

 

Le nom trombone, d’origine italienne s’imposa à partir du XVIIème siècle. Il signifie littéralement « grande trompette ». Et en effet, les trombones sont des trompettes plus graves (donc plus grandes) que celles décrites la semaine dernière et plus aigus que les tubas. Ils forment la tessiture complète des cuivres clairs. Pendant toute son histoire, le trombone a subi peu de modifications. Son principe en fait d’emblée un instrument efficace. On constate cependant des variantes de grandeur et on peut rencontrer, au XIXème siècle, des trombones à pistons au lieu de coulisse.

 

L’instrument est constitué d’un tube cylindrique courbé comme un « S » allongé. La section suivant l’embouchure s’appelle la coulisse, elle permet au musicien de faire varier la longueur de l’instrument et ainsi d’obtenir la note désirée. Lorsque le tromboniste pousse la coulisse, il agrandit l’instrument et le son est plus grave, lorsqu’il la tire, il rétrécit la longueur du tuyau et le son est plus aigu. Le son quitte l’instrument par un pavillon évasé. Comme tous les instruments à embouchure, le trombone sonne par la mise en vibration des lèvres et l’air insufflé par le musicien. La pression est canalisée par l’embouchure dans le corps de l’instrument. La qualité du son dépend de la vibration, de la colonne d’air (c’est la part de l’instrumentiste) ainsi que de la qualité du corps de l’instrument dont les matériaux, l’épaisseur, le diamètre et la forme du tube sont essentiels (c’est la part de l’instrument).


 


 

 

Mais comme pour ces instruments, le son peut être articulé grâce à la langue, produisant différentes consonnes à l’intérieur de l’embouchure. Les articulations les plus habituelles sont le détaché (la langue produit alors des « t ») et le lié (legato : la langue produit alors la consonne « l »). Mais pour les passages rapid
es, les trombonistes jouent sur les doubles ou triples coups de langue (en alternant les consonnes « t » et k » »). Notons qu’une absence d’articulation (émission continue du souffle) entre deux notes donne l’effet propre au trombone qui est le glissando.

 

Le travail du tromboniste se situe avant tout dans l’exercice de la tension des muscles faciaux (le masque) pour faire varier la pression d’air dans le tuyau et produire les notes. Sur chaque longueur de tuyau, c’est comme si on avait une trompette naturelle qui peut non seulement jouer sa note fondamentale, mais les harmoniques supérieures. Le musicien pourra donc jouer toutes les notes de tous les tons en alternant le jeu sur les harmoniques et l’usage de la coulisse (qui change le son fondamental par l’allongement ou la réduction du tuyau).


 

trombone 1
 


 

La coulisse est donc décisive et comporte plusieurs positions (jusqu’à sept pour le trombone ténor). La première position montre la coulisse complètement rétractée tandis que la dernière la montre au maximum de son élongation.

 

Les trombones existent en cinq registres : soprano, alto, ténor, basse et contrebasse. Sans précision, le mot trombone désigne l’instrument ténor. Si le soprano se rapproche fort de la trompette, il semble assez moderne dans sa conception. L’alto est transpositeur en mi bémol ou en fa. On le trouve dans les œuvres symphoniques de Beethoven (à partir de la cinquième symphonie). Le ténor est le standard, celui qu’on trouve en première place dans les pupitres d’orchestre. Le trombone basse a presque la même taille que le ténor, mais il a un plus gros calibre et un pavillon plus imposant. Dans l’orchestre, il se place à droite du ténor. Il est très présent dans les formations de jazz et dans les ensembles modernes de cuivres. Le trombone contrebasse est plus rare et le tuyau de base, plus long, est enroulé sur lui-même. Sa sonorité ténébreuse a séduit Richard Wagner, Gustav Mahler et Richard Strauss (entre autres).



 

 

 

Si les sacqueboutes et les trombones font partie de la musique d’église depuis la Renaissance et de l’opéra depuis sa création à l’aube du XVIIème siècle, le répertoire du trombone solo et en musique de chambre trouve ses lettres de noblesse en Autriche durant la période classique, au milieu du XVIIIème siècle. Des compositeurs comme Léopold Mozart, Georg Wagenseil, Johann Albrechtsberger l’utilisent souvent. Mozart en fera un usage inoubliable dans le « Tuba mirum » de son Requiem. Dans la musique romantique, le trombone s’intègre définitivement à l’orchestre symphonique où il peut devenir un soliste très émouvant, comme dans la Symphonie funèbre et triomphale de Berlioz ou la troisième symphonie de G. Mahler.

 

Mais le trombone est aussi utilisé en jazz, depuis les fanfares « New Orleans » jusqu’au free jazz en passant par le swing, le bebop et le cool. Instrument parmi les favoris des fanfares de musiques de salsa, de funk et même de reggae et de ska, le trombone séduit tous les mélomanes pas les charmes à la fois solides et envoûteurs de ses sonorités.


 

trombones section jazz band Chicago

Section des trombones d’un Jazz Band de Chicage


 

Nous terminerons bientôt cette grande famille des cuivres par un aperçu des tubas qui, par la variété de ses formes, constituent une véritable sous-famille très intéressante.